DEUX SOEURS de Marine BACHELOT NGUYEN avec Océane MOZAS à  la Ferme du Buisson Scène nationale, Noisiel (77) le Samedi 25 janvier 2025 à 20h30.

© François Passerini

Résumé d’Océane MOZAS

« Il y a longtemps, longtemps, dans un village du Nord Vietnam naissent deux sœurs… »

« C’est dans l’écho de ces quelques mots que Marine Bachelot Nguyen part sur les traces des deux sœurs Trung, véritables héroïnes qui, au début de notre ère, ont su repousser l’envahisseur chinois et libérer le peuple vietnamien.
Tout comme Marine, petite fille d’une grand-mère vietnamienne, j’ai été nourrie par nos légendes familiales, celles de la guerre et de l’exil, celles des séparations et des retours impossibles. C’est sur les traces de nos racines et mémoires intimes que se tisse le récit de 
Deux sœurs. Avant que les fantômes du passé ne s’évaporent à jamais… » 

Texte Marine Bachelot Nguyen
Conception, écriture et interprétation Océane Mozas
Collaboration artistique Igor Skreblin
Création sonore Aline Loustalot
Création lumière Philippe FerreiraVidéo Manuel Rufié
Réalisation du décor dans les Ateliers de construction du Théâtre de la Cité sous la direction de Michaël Labat Réalisation des costumes dans les Ateliers du ThéâtredelaCité sous la direction de Nathalie Trouvé
Avec l’aimable collaboration de Georgia IvesRemerciements Morgan MozasTrần Mạnh TuấnCô Huong Nguyen, Y-Lan Phung et Minh-Anh Pan

Les sentiments, c’est comme la peau, il y a plusieurs couches qui communiquent naturellement entre elles sans que l’on en ait conscience.

Dans l’ignorance on peut aussi parler de seconde peau, celle qui n’a pas vocation d’être exposée ou de s’exprimer et donc qui n’est pas au premier plan.

Le sentiment d’exil ou de déracinement, il faut l’avoir éprouvé pour en parler, ça ne s’invente pas. Parler de soi, parler des autres, dans un monde agité par les guerres et les migrations, les victimes collatérales ne manquent pas. Il est possible d’avoir du recul par rapport à cette réalité. Mais ce n’est pas ce qui intéresse l’artiste qui puise ailleurs sa force d’interroger l’humain, l’humaine.

Il y a de la madeleine de Proust dans la démarche de Marine BACHELOT NGUYEN et de Océane MOZAS, qui ont toutes deux des origines vietnamiennes et sont françaises.

Non cela ne s’invente pas, ce sont les voix de leurs grands-mères vietnamiennes respectives qui ont piqué leur épiderme.

C’est que la langue vietnamienne est aux antipodes de la langue française et d’ailleurs difficile à assimiler en raison de la complexité de ses tonalités.

Ces voix, Marine BACHELOT NGUYEN et Océane MOZAS les ont toutes deux entendues dans leur enfance et à l’âge adulte. Elles en éprouvent tout le charme, tout le mystère d’autant plus qu’elles ne comprennent pas la langue.

Aller au Vietnam, dès lors, quand il s’agit de retrouver une parente dont on a été séparée depuis des années, c’est un choc émotionnel. La pièce exprime ce ressenti à travers le récit des destinées de deux sœurs dont le sang, rappelle Marine BACHELOT NGUYEN, coule dans ses veines. En même temps, nous avons envie d’ajouter que les ruisseaux forment les grandes rivières et rejoignent la mer humaine. Ainsi le récit va se trouver enrichi des propres souvenirs d’Océane MOZAS. 

Evidemment le destin des deux sœurs, la grand-mère et la grand-tante n’a rien d’héroïque, mais comment ne pas faire le rapprochement avec celui des deux sœurs Trung qui ont libéré le Vietnam de la domination chinoise.

Ce faisant, l’auteure fascinée par une grand-mère toujours mystérieuse, en voulant rendre hommage aux    femmes vietnamiennes les idéalise :  elles sont dures en affaire, elles parlent la bouche pleine, elles me sourient mystérieusement, elles sont soucieuses, inquiètes, elles sont devenues minérales, elles sont devenues végétales…

Mais l’auteure parle aussi de fantômes qui se racontent des histoires dans une langue qu’elle ne comprend pas.

Il y a quelque chose d’irrationnel dans ce récit qui fouille dans les racines les plus enfouies de ce qu’on appelle la quête des origines.

En tournant leurs visages vers ceux de leurs grands-mères tels un ailleurs qui se profile infiniment, Marine et Océane affectivement se rejoignent et nous rejoignent.

Que l’on se rappelle tout de même, le Vietnam a été colonisé de 1885 à 1954 (les dates diffèrent suivant les historiens) par la France à l’initiative de Jules Ferry et c’est la grande histoire. Aujourd’hui, il importe de parler des petites histoires qui en découlent, elles peuvent expliquer bien des choses.

De beaux paysages du Vietnam sur fond de scène illustrent les voyages réalisés par Marine BACHELOT NGUYEN et Océane MOZAS mais le regard des auteures est plus profondément intérieur. Lorsqu’au milieu du récit jaillissent quelques chansons populaires vietnamiennes, l’émotion gagne le public.

Océane MOZAS déploie tous ses talents de comédienne, conteuse, danseuse, pour porter avec émotion et passion un récit à la fois intime et épique. Il ne dure qu’une heure et pourtant le public a l’impression d’avoir fait un long voyage dont il ressort ému, charmé. Cette quête des origines, elle est universelle !

Evelyne Trân

Le 5 Janvier 2025

N. B : Le spectacle a eu lieu récemment aux Plateaux  sauvages à Paris et au C.D.N. de Reims.

N. B : Article également publié dans le Monde Libertaire.fr

Laisser un commentaire