Stormy Weather de Thierry DELAIR au Théâtre de l’ESSAION 6, rue Pierre au Lard 75004 PARIS du 18 mai au 24 juin 2023, jeudi, vendredi, samedi à 21 H 15.

  • Mise en scène : Svetlana de Cayron
  • Distribution : Jean-Baptiste Artigas (pianiste), Renaud Cathelineau (contrebassiste), Benjamin Petit (saxophoniste)

Avez-vous déjà rêvé d’assister à une répétition de concert de jazz ?

Grâce au boute en train des trois artistes qui interprètent la pièce de Thierry DELAIR, le public a vraiment l’impression de découvrir les coulisses d’un laboratoire de recherche musicale.  

Un temps suspendu que celui de la création, un moment unique où les artistes se donnent à fond sans se préoccuper du public car les erreurs, les fautes d’appréciation font partie, lors d’une répétition, de l’inconnu ouvrant la voie à de futures créations, découvertes.

La musique de jazz est une langue qui permet à des individus des quatre coins du monde de se comprendre, s’apprécier et s’enrichir mutuellement.

Cependant les trois compères dont tout le sérieux repose sur leur amour du jazz, ont comme tout le monde leurs humeurs, leur égo, leurs problèmes de couple etc.

Il y a de l’orage dans l’air, ce jour de répétition. Aucun des musiciens n’est vraiment concentré. Le contrebassiste est en conflit avec sa femme qui ne cesse de l’appeler sur son portable. Les deux autres, le pianiste et le saxophoniste se disent leurs quatre vérités et finissent par en venir aux mains. Le contrebassiste les sépare avec sa contrebasse au risque de la blesser.

L’ambiance est électrique mais aussi très drôle. Ces musiciens sont de bons vivants. Entre quelques verres de whisky, des parts de lasagnes et les coups de fil à une épouse furieuse, le temps qui devait être consacré à la musique se dilue forcément. Alors que l’on croit assister à la fin du groupe, les artistes se ressaisissent, reprennent chacun leur instrument. Ils oublient tout, ils jouent et c’est un bonheur !

Et si les humeurs, les problèmes de couple, toutes les contingences matérielles entraient en jeu dans le processus créatif ? Les artistes s’en passeraient bien mais ils seraient coupés du monde. Or la musique de jazz, c’est la vie avec ses courants d’air, ses turbulences, ses surprises aussi.

Cette joie de vivre musicale exprimée par les trois artistes talentueux est fabuleuse. « Je parle Jazz » aurez-vous envie de dire en sortant du spectacle !

Le 20 juin 2023

Evelyne Trân

N.B : Jean-Baptiste Artigas (pianiste), Renaud Cathelineau (contrebassiste), Benjamin Petit (saxophoniste) étaient les invités de l’émission DEUX SOUS DE SCENE sur Radio Libertaire 89.4, le samedi 17 Juin 2023, en podcast sur le site de Radio Libertaire.

Article publié également sur le Monde Libertaire.fr

https://www.monde-libertaire.fr/?articlen=7321&article=Le_temps_est_a_la_tempete_pour_le_brigadier

Le Chef-D’œuvre Inconnu d’Honoré de Balzac – Adaptation et jeu : Catherine AYMERIE au Théâtre de l’ESSAION – 6, rue Pierre au Lard 75006 PARIS- Du 27 mars au 27 juin 2023 les lundis, mardis à 19 H 15, le dimanche à 19 H 30.

Mise en scène : Michel FAVART

Le chef d’œuvre inconnu ? Il s’agit d’une des nouvelles de Balzac les plus connues.  Souvenons-nous des émerveillements de Malraux pour qui l’art était la manifestation suprême du génie humain. L’art c’est le plus court chemin de l’homme à l’homme, assurait-il.  Quand nous simples spectateurs, spectatrices, admirons une toile d’un maître, oui nous pouvons être saisis par le vertige mais une chose est sûre c’est que nous sommes en quête d’une émotion rare, voire unique.

Alors mettons nous à la place de l’auteur de la toile, c’est ce que fait Balzac en donnant la parole à trois peintres réunis dans un atelier : un jeune débutant, Nicolas Poussin, un peintre reconnu mais académique Porbus, portraitiste du roi Henri IV et un vieux maître Frenhofer (personnage fictif) qui entend régner au-delà de toutes les contingences.

Les déclarations de ce dernier relèvent de la philosophie, en voici un florilège :

La mission de l’art n’est pas de copier la nature mais de l’exprimer.

Tu n’es pas un vil copiste mais un poète ! Nous avons à saisir l’âme, la physionomie des choses et des êtres.

Ni le peintre, ni le poète, ni le sculpteur ne doivent séparer l’effet de la cause qui sont invinciblement l’un dans l’autre.

Porbus et Poussin sont fascinés par ce personnage qui leur parle du portrait qu’il a fait de Catherine Lescault, une belle courtisane appelée La belle Noiseuse, une œuvre quasiment accomplie mais qu’il souhaite comparer à diverses natures.

C’est alors que le jeune Poussin propose à Frenhofer de lui donner comme modèle sa propre femme Gillette.

La façon dont Balzac fait intervenir Gillette au milieu de ces artistes seulement préoccupés par leur art, laisse augurer de son questionnement sur la condition de la femme ici sacrifiée aux desideratas et fantasmes des peintres.

Nous n’en dirons pas plus pour ne pas déflorer l’intérêt de cette nouvelle parfaitement adaptée pour le théâtre.

 Catherine AYMERIE, interprète de tous les personnages est fabuleuse. Il ne s’agit pas d’une simple lecture car sa voix suggère une infinité de sensations. Alors même que la mise en scène de Michel FAVART est très sobre, le spectateur a vraiment l’impression de pénétrer dans l’atelier du vieux maître, Quai des Augustins à Paris (situé à deux pas de l’atelier où Picasso peignit Guernica), il s’identifie au jeune Poussin intrigué etc. Mais d’emblée, dès l’apparition de Catherine Aymerie sur scène, il est ébloui par sa présence énigmatique, qui telle Sibylle prophétise le mystère et la folie qui rôde et aboutira – chaque spectateur l’espère – à la révélation de ce chef d’œuvre inconnu.

Ce que nous n’avons pas réussi à saisir par une simple lecture de la nouvelle devient grâce à son incarnation, une évidence : il n’y a pas d’œuvre qui ne soit hantée par la présence de son créateur ou de ses modèles.

Le 13 juin 2023

Evelyne Trân

N.B : Article initialement publié sur le Monde Libertaire.fr :

https://www.monde-libertaire.fr/?articlen=7304&article=Honore_mon_cher_brigadier_!

CHANSON : VALERIE MISCHLER, panthère indomptée. Au concert organisé par les Dimanchanteurs en co-plateau avec Nicolas Jules, le dimanche 25 juin à 18h00, à bord du Marcounet, amarré au Pont-Marie. Résa : sur le site du bateau.

Une VALÉRIE MISCHLER radieuse : une énergie nuancée, aux couleurs du vécu, dans ses propres textes aux images diablement évocatrices, où se font jour les sentiments que nous vivons tous à un moment ou à un autre. Le doute, le désir, l’espoir. 

A partir d’un récit de vie, récemment publié, cette auteure fait se télescoper des chansons formant un autoportrait autant qu’un miroir qu’elle nous tend avec malice, ironie et une vivifiante impertinence. 

Femme de scène à la sensualité épanouie, au sourire ravageur, au regard profond, si expressif, elle possède la clé qui nous ouvre la porte d’un imaginaire foisonnant, multiple, mouvant, mais se révélant à notre portée, familier. 

Car ses mots du quotidien, assemblés en un patchwork dense, éclairant, font mouche. 

Et puis, cette clarté exceptionnelle dans la diction, ce raffinement dans les intonations, ce subtil et puissant art de comédienne. 

Puissant, parfois un peu trop. Une exaltation palpable du bonheur, certes ultra communicative, fait oublier à ce phénomène vocal doté d’une rare intelligence de la scène combien nous aimerions quelques pauses de douceur, quelques moments apaisés. Et même un ou deux titres à cappella. 

Ses deux excellents accompagnateurs s’en remettront… Par ailleurs, ils n’ont nul besoin d’effets sonores supplémentaires. Leur intuition, leur complicité naturelle, dynamisante, leur permettant d’exprimer l’essentiel.

Donc, pour ce trio d’enfer, un rythme aussi soutenu mais quelques  » moderato cantabile » qui n’enlèveraient rien à ce spectacle irradiant, euphorisant.

Un programme où l’on retrouve, immanquablement, quelques textes de Bernard Dimey.Ce poète incandescent que notre interprète nous avait totalement fait redécouvrir voici deux décennies. Un must absolu. Et formidablement réédité parmi un double CD paru chez EPM. La plupart des 30 titres, longtemps introuvables, sont rassemblés en deux parties dont un généreux bonus de…20 titres

La même conviction en studio qu’à la scène, pour restituer l’univers d’une femme de plume hors mode, aux partis pris impétueux ou tendres que savent traduire la compositrice Catherine Bedez ou Xavier Rubin dans les premières gravures. 

Disque, scène, tout se complète. Tout se tient. 

C’est un événement que ce retour sur la scène du Forum Leo Ferré à Ivry sur Seine, ce 8 juin 2023 !

D’autres scènes, dans notre capitale et partout en France, sont en prévision…

Valérie l’indomptée – redevenue nomade – a encore de belles sensations à transmettre.

Une nouvelle à répercuter. Urbi et orbi…

On aime sans modération cette femme-uppercut. Au regard tendresse, toujours.

                                                                          Laurent GHARIBIAN

CD double « INDOMPTEE  » réf. 987179

Le récit de vie évoqué plus haut a pour titre « L’ARTISTÔLIERE suivi de Brèves de Boudoir» publié en mars 2023 chez EPM