SOIREE JAQUES DUTOIT LE 16 NOVEMBRE 2017 AU CINEMA L’ECRAN – PLACE DU CAQUET – 93200 ST DENIS – METRO ST DENIS BASILIQUE – Projection de – IMMERSION à partir de 19 Heures –

L ART ET LA VIE 

Rencontre avec Jaques Dutoit, Bernard Guillot

un verre convivial conclura la soirée

IMMERSION de Jaques DUTOIT

Documentaire

France Suisse/2011/couleur/1h17 avec Bernard GUILLOT

Bernard Guillot est dessinateur, peintre et photographe. Le film nous montre son travail artistique mais aussi son quotidien dans sa maison au coeur du Massif Central.

On le voit peindre, nager, méditer, se déguiser, faucher et même faire de la confiture. Une épicurienne réflexion sur les cheminements de la création.

 

La Révolte de Villiers de l’Isle-Adam avec une mise en scène de Salomé BROUSSKY – Au THEATRE DES DECHARGEURS – 3 Rue des Déchargeurs 75001 PARIS – du 31 oct 2017 au 9 déc 2017 – du Mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi à 21 H 30 –

Texte Villiers de l’Isle-Adam

Mise en scène :

Comédien(s) :

Lumières :

Dominique Borrini

 

Elle donne l’impression de vomir sa vie sous les yeux ahuris de son mari. Oui, sa vie lui fait horreur, une vie étriquée, faite de petits calculs, qui pendant quatre ans et demi a projeté l’image d’une épouse parfaite, excellente comptable qui a permis la fortune de son mari banquier peu soupçonneux de la colère intérieure, du volcan qui fulmine derrière la façade de l’idéale épouse.

La révolte est une pièce écrite par Villiers de l’Isle-Adam, en 1870, représentée seulement cinq fois à sa sortie, qui donne la parole à une femme culminant toutes les raisons de se révolter contre ses conditions de vie, programmées par une étiquette bourgeoise, sans fantaisie, rigide.

 Intelligente, la femme en question a su se glisser dans le moule pour satisfaire la galerie et notamment son mari. Elle s’est résignée, a dompté ses éclairs de révolte, utilisant son énergie au travail pour s’occuper, pour oublier ses accès de rêves, ses accès de fièvre.

Avez-vous déjà vu une huitre sortir de sa coquille ? Elisabeth est une perle, une perle idéaliste. Après avoir décidé de tout quitter, son mari, son travail, sa fille, quatre heures plus tard, elle revient au bercail où elle découvre Félix, le fringant banquier, gisant à terre. Ce dernier semble-t-il n’a rien compris à l’échauffourée d’Elisabeth, comment d’ailleurs la comprendrait il, son mode de perception est différent, tellement plus terre à terre. Seulement il est attaché à cette femme, par autre chose, peut-être l’habitude, peut-être l’amour.

Au fond qu’importe qu’Elisabeth soit revenue. Le combat est d’ordre existentiel, Elisabeth n’obéit qu’à elle seule, à son corps défendant qui la ramène au bercail parce qu’il s’est trouvé démuni à l’idée sans doute d’affronter le vide, la solitude.

Du coup, le manège du banquier et de sa parfaite épouse apparait comme un moyen de s’occuper quand les autres voies, celles du rêve, de l’imagination, de la poésie ont été bouchées.

Le corps réclame du concret pas seulement des rêves, allez savoir !

Curieux rapports de force entre Félix et Elisabeth qui se supportent mutuellement, l’une ayant l’apanage de l’âme.

Elisabeth n’a rien d’une diablesse féministe, elle est une victime de la misogynie ambiante que reproduit comme un perroquet son mari, peu perspicace. Quand il parle de sa femme, Félix c’est comme s ‘il faisait le tour de sa propriété, ses compliments sont déjà révoltants. Ce qui transparait dans le monologue d’Elisabeth, c’est une souffrance exacerbée par un trop long silence. Félix qui au fond n’est qu’un pauvre bougre, souffre aussi.

 Une personne parle, incarnée par une femme qui appelle à la liberté de vivre suivant son cœur, qui s’oppose au carcan patriarcal, voire à une civilisation et rejoint le camp des poètes, des visionnaires tels que Villiers de l’Isle-Adam, Verlaine, Mallarmé ou Flaubert ses contemporains.

 Avec beaucoup de sensibilité, Maud WYLER interprète cette femme exsangue, exténuée, tandis que Dimitri STOROGE, laisse percer derrière l’enflure, l’inconsistance de l’homme social face à l’homme tout court.

La mise en scène de Salomé BROUSSKY privilégie l’intériorité des personnages, elle est réaliste, sans excès superfétatoires, la limpidité des propos de Villiers de L’Isle-Adam serre la gorge d’autant plus.

 

Paris, le 1er Novembre 2017            Evelyne Trân

L’Art de Suzanne Brut de Michael STAMPE – Mise en scène et scénographie de Christophe LIDON avec Marie-Christine DANEDE au THEATRE DES DECHARGEURS – 3, rue des Déchargeurs 75001 PARIS – du 31 oct 2017 au 23 déc 2017 – Mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi à 19 H 30 –

 

Il y a l’œuvre qui existe pour elle-même, l’œuvre, seulement l’œuvre. Et puis il y aussi l’intention de l’auteur, comment se fait-il que cette intention puisse prendre forme, toucher le spectateur « brutalement » sans qu’il ait besoin de se référer à sa culture, à son savoir, à ses notions d’ordre, de beauté, de connu ou d’inconnu. Il y a cette phrase inculte au bout des lèvres « Je n’ai jamais vu ça ! ».

Nous avons tellement soif d’émotions, il n’y a qu’à voir le nombre de gens qui se pressent pour visiter une exposition  de Gauguin au Grand Palais, quitte à faire deux heures de queue. Il y a de l’art brut chez Gauguin, soutenu certes par une grande expérience, du génie, mais devant un tableau qui nous fascine, nous pouvons oublier l’auteur, c’est comme une image qui fait écran à nos désirs, qui zigouille notre tranquillité, notre assurance, notre indifférence, qui brutalise nos certitudes « Ah, j’ai déjà vu ça ! ».

Certains artistes parce qu’ils sont submergés par leurs émotions vont nous offrir des visions déconnectées de notre routine. Nous ne pouvons pas les analyser suivant nos critères objectifs. Mais leurs créations s’imposent comme jaillies de nulle part, elles répondent parait-il à des pulsions. Pulsions d’êtres sacrifiés à la norme. Eh oui, il y a des larmes, des cris, de souffrances, des sensations, des visions si intenses qu’elles peuvent trouver leur chemin d’expression, hors les normes de l’homme normal.

Nous sommes bien contents de prendre des trains qui ne déraillent pas mais nous sommes également heureux de pouvoir accéder à des visions qui s’écarquillent bien au-delà des soucis matériels, qui répondent à nos seules sensations, et que nous importe qu’elles soient vérifiées, homologuées, validées, elles nous appartiennent en propre comme le jour naissant, et si elles peuvent être partagées c’est parce qu’elles sont nées pour cela, mais demanderez-vous à une fleur si elle demande à être regardée !

Suzanne BRUT joue le rôle de fleur dans notre jardin imaginaire. Fleur en pot, muette, elle résiste à l’indifférence des religieuses qui l’ont recueillie. A travers un filet d’ombre, Michael STAMPE, est entré dans l’œil ouvert de la peintre, dans le compost de ses rêves étourdis où tout s’entremêle. Oui, dans la terre de Suzanne BRUT, il y a des signaux de souffrance dont elle ne peut se prémunir qu’en peignant, en parlant à Sainte Jeanne ou à la Sainte Vierge. C’est cruel, comment croirez-vous à ce qu’elle peint ? Il n’y a pas de plantes qui ne recherchent la lumière ou le regard de l’autre et Sainte-Jeanne pour Suzanne représente ce jour qui lui permet, quoiqu’il arrive, de peindre par bonheur.

 Stupéfiant tableau que ce spectacle mis en scène par Christophe LIDON, rarissime vision d’une fleur femme peintre sous le flux de l’ombre. La présence de Marie-Christine DANEDE appelle le regard et l’ouïe d’une façon quasi fantastique !

Paris, le 1er Novembre 2017              Evelyne Trân