Et pendant ce temps, Simone veille ! Au studio Hébertot – 78 Bis Bd des Batignolles 75017 PARIS – du 27 Novembre au 10 Janvier 2016 du mardi au samedi à 21 Heures, le Dimanche à 15 Heures –

Et pendant ce temps, Simone veille !

Auteurs  Trinidad, Bonbon, Hélène Serres, Vanina Sicurani et Corinne Berron – Mise en scène et Création lumière : Gil Galliot
Interprètes : Trinidad, Fabienne Chaudat,
Agnès Bove, Serena Reinaldi
Direction musicale : Pascal Lafa
Textes chansons: Trinidad

Elles ont bien raison de le souligner, Marcelle, France, Giovanna, et Simone (celle qui veille) qui trèpignent chacune du haut de leurs talons d’ouvrière, de petite bourgeoise ou de classe moyenne, la dépénalisation de la pilule contraceptive avec la loi Neuwirt votée en 1967, ce fut un petit pas pour la femme mais un grand pas pour l’humanité qui vaut bien celui de l’homme sur la lune.

Une loi qui semblait renvoyer aux calendes grecques celle du 31 Juillet 1920 qui interdisait toute contraception sous peine d’amende et de prison et déclarait « crime contre l’État » l’avortement . En effet, la pilule n’était pas remboursée par la sécurité sociale et il faudra attendre la promulgation de la loi Veil, le 17 Janvier 1975, pour la dépénalisation de l’avortement, sous certaines conditions.

Les premières femmes qui ont bénéficié de la pilule contraceptive sont tout au plus sexagénaires aujourd’hui et encore fort pimpantes.Leurs tribulations féministes couvrent trois générations, certaines sont issues de familles de 14, 20 enfants, ce qui est inimaginable de nos jours.

TRINIDAD, l’auteure principale de cette épopée féminine, a pris le parti d’en rire, en faisant sortir de leurs gonds trois femmes aux destins différents, mais toutes allumées par un désir d’affirmer leurs droits, de se reconnaitre en tant que femmes dans un monde où elles peuvent encore être éclaboussées, humiliées en tant que sexe faible.

Photo Simone HD ©Jogood

Photo Simone HD (C)  Jogood

Tu nais homme ou tu nais femme, tu veux ou tu veux pas d’enfant, un coup de dés du hasard !! ?? Dire que le vingtième siècle a bouleversé cette fatalité binaire ! Les femmes d’aujourd’hui ont en héritage des siècles de luttes pour la libération morale et sexuelle de la condition féminine. « On ne nait pas femme, on le devient », constatait amèrement Simone de Beauvoir. Mais le racisme sexiste écorne aussi bien les hommes. Dame nature a somme toute bien fait les choses, nous nous ennuierions dans un monde asexué.

Ce que comprennent avec beaucoup d’humour les femmes que met en scène la comédie de TRINIDAD. Pas question de renoncer à sa féminité, aux plaisirs de la séduction et de se ficeler dans le carcan d’une idéologie féministe. Il y a du bonheur à se sentir femme, à le dire, à le chanter, c’est ce qui frappe vraiment dans ce spectacle où les comédiennes se fondent dans cette épopée effarante des années 5O à nos jours, de façon jubilatoire, quasiment explosive.

Photo Simone 2 HD©Jogood

 Photo Simone HD (C)  Jogood

Les chansons de TRINIDAD font sauter le bouchon de vieux tubes décapants où s’engouffrent pêle mêle sur l’écran de nos souvenirs, les clins d’œils de Gainsbourg et Birkin, Claude François etc. sans oublier les désuètes mais toujours à l’oeuvre, publicités ménagères. Jolie pommade des actualités des 20ème et 21ème siècles qui continuent à suer – eh oui, les images transpirent – elles le peuvent en levant leur regard vers Simone VEIL, impassible et souriante, qui réussit à faire voter la loi sur l’avortement face une assemblée ahurie d’hommes stupéfaits.

Voilà un spectacle en pleine ébullition, joyeux et instructif, servi par la mise en scène légère et super bien cadencée de Gil GALLIOT. Un quatuor de femmes qui continue à ruer dans les brancards pour que tienne à l’affiche cette Simone qui veille – dit-il – au Féminin.

Paris, le 31 Décembre 2015                           Evelyne Trân

LE VOYAGE IMMOBILE DE PENELOPE par la Cie la main d’œuvres – Conception, scénographie, interprétation Katerini Antonakaki – THEATRE D’OBJETS, D’IMAGES ET DE SONS – au THEATRE DUNOIS 7, rue Louise Weiss 75013 PARIS du 15 au 20 Décembre 2015 puis en tournée à AMIENS et à AVIGNON –

penelope

théâtre d’objets, d’images et de sons, spectacle tout public à partir de 7 ans,

jauge 60 spectateurs –

conception, scénographie, texte, interprétation Katerini Antonakaki

regard extérieur, lumières, bruitages Sébastien Dault

piano enregistré Ilias Sauloup    vidéo Mickaël Titrent

extraits  l’Odyssée d’Homère – la lettre de Pénélope à Ulysse d’Ovide –les plaisirs de la porte de Francis Ponge

Figure mythique de l’Odyssée, Pénélope appelle l’apaisement. Son voyage immobile, il apparait déjà sur son visage, par exemple sur un vase grec la montrant en train de tisser un voile. Il ne s’agit que d’une image bien sûr, apparemment immobile, mais les esprits contemplatifs savent bien que l’immobilité est une illusion de notre perception et que le temps s’amuse avec les vivants car en dépit de toutes les horloges et mesures du monde, il reste très  subjectif.

 Que peuvent bien peser les vingt années de Pénélope en train d’attendre son époux Ulysse par rapport à une course de marathon, l’explosion d’un bouchon de champagne ou l’attente insupportable devant un guichet quelconque.

Le temps c’est comme une cruche qui aboie. Imaginez une porte entrouverte qui laisse passer un rai de soleil. Vous n’avez rien à faire, sauf à entrer, sauf à vous laisser guider par cette mince lumière incarnée par Katerini ANTONAKAKI qui entraine les spectateurs dans un audacieux et fantastique jeu de piste à la découverte des nombreuses pièces de la maison de Pénélope.

Auparavant, le public avait pu découvrir les maquettes miniatures des meubles qui composent l’intérieur de la maison dont le plan est dessiné à même le sol.  Equipée d’une petite valise, Katerini, Pénélope, jette le dé qui va décider de l’ordre de son parcours. A chaque pièce correspond un morceau de puzzle de carte de ce pays imaginaire. Chacun des petits objets sur la route de Pénélope, loin de représenter des temps morts, appellent le clin d’œil, ils transpirent, ils crient dans le silence, ils rougissent d’exister tout à coup dans l’incongruité d’un regard inconnu, celui d’un spectateur.

 Katerini ANTONAKAKI marche pieds nus comme si elle avait conscience que le silence et la fixité apparente des objets pouvaient être bouleversés par la venue d’un humain et qu’il fallait aller très doucement à leur  rencontre.

 Les bruitages, les lumières assurés par Sébastien DAULT sont en symbiose avec cette Pénélope dont le voyage immobile se révèle très actif : elle est non seulement danseuse, équilibriste mais aussi l’interprète d’extraits de l’Odyssée d’HOMERE, la lettre de Pénélope à Ulysse d’OVIDE et les plaisirs de la porte de Francis PONGE.

 Extraordinaire voyage immobile, ineffable, Katerini ANTONAKAKI cultive le temps presque à la façon des enfants. Disons qu’elle apprivoise  le temps, celui qui se dépose sur les objets vivants  dont on a besoin pour se rappeler à soi-même, mais qui peuvent  être aussi capricieux, inconnus et bizarres à l’image de notre ombre, touchés, vécus !

 Paris, le 30 Décembre 2015       Evelyne Trân

N. B : En tournée

Le Safran, scène conventionnée d’Amiens Métropole

3, rue Georges Guynemer – 80080 Amiens   > les 23 et 24 mai 2016

Festival Avignon Off  lieu à préciser  > en juillet 2016

 

Le Jour où j′ai rencontré Franz LISZT de et avec Pascal Amoyel au THEATRE DU RANELAGH – 5, rue des Vignes – 75016 PARIS – à partir du 2 Décembre 2015 du Mercredi au samedi à 20 H 45 et le dimanche à 17 heures

de et avec Pascal Amoyel

Le jour où j'ai rencontré Franz Liszt au Théâtre le Ranelagh

Auteur : Pascal Amoyel Mise en scène : Christian Fromont  Avec : Pascal Amoyel

Lumières: Philippe Séon   Programme musical :

Johann Sébastien BACH (1685-1750) : Prélude Clavier Bien tempéré I BWV 853 en mi bémol mineur

Wolfgang Amadeus MOZART (1756-1791)
La petite tartine de beurre
La marche turque
Carl CZERNY (1791-1857)
Etude de mécanisme
Ludwig van BEETHOVEN (1770-1827) – Franz LISZT (1811-1886)
Allegretto de la 7e Symphonie
Franz LISZT (1811-1886)
Vallée d’Obermann (1ère Année de Pèlerinage)
Légende de Saint François de Paule marchant sur les fl ots
Chant du berceau
Frederic CHOPIN (1810-1849)
Nocturne N°1 opus 9 en si bémol mineur
Richard WAGNER (1813-1883) – Franz LISZT (1811-1886)
Mort d’amour d’Isolde
Pascal AMOYEL
Improvisations

C’est dans un des théâtres les plus stylés de Paris, le Théâtre du RANELAGH qui fut à l’origine un salon de musique à l’acoustique exceptionnelle que Pascal AMOYEL donne rendez-vous aux âmes musiciennes pour leur conter « son LISZT».

Pascal AMOYEL est fasciné par le parcours romanesque du célèbre musicien hongrois qui n’eut pas de véritable enfance puisqu’il fut contraint par son père très jeune de donner des concerts – il se produisit à 11 ans devant le Roi de France – eut une jeunesse sentimentale agitée puis une maturité pieuse lorsqu’il finit par rentrer dans les ordres. Il rencontra les plus grands artistes de son époque entre 1812 et 1845, Hugo, Balzac, Baudelaire, Musset etc., mais surtout il inventa le « récital » et révolutionna le  piano.

Enfant, il n’est pas aisé d’exprimer ses sentiments avec des mots d’adulte, Pascal AMOYEL a eu la chance d’éprouver que mieux que des paroles, la musique pouvait exprimer, révéler des milliers de sensations suspendues aux seules touches d’un piano.

 Sa première révélation, ce fut le chant de berceau de Liszt, extraordinaire, aérien, dont les notes venaient flairer la pénombre, les silences, la chaleur affective de ses grand parents, et ce désir naissant chez l’enfant d’être magique à son tour, guidé par le seul vertige de ces émotions, de devenir la main instrumentale capable de libérer, de faire jaillir la musique.

Le pianiste ne vibre pas seulement avec ses mains, c’est tout son corps qui est appelé à devenir l’instrument organique vivant et stratège d’une musique invisible, mystérieuse.

Pour illustrer musicalement la vie de Liszt, Pascal AMOYEL a convoqué les compositeurs BACH, MOZART, CZERNY, BEETHOVEN, WAGNER (son gendre) CHOPIN, LISTZ lui-même.

Des pages musicales très riches qui captent aussi bien la joie, l’étonnement, la curiosité de l’enfance que la tristesse et la quête d’esprit, immatériel …

Charme et passion dominent ce spectacle où Pascal AMOYEL, pianiste virtuose, humble, délicat et drôle aussi, communique au public son bonheur musical avec LISZT, un vrai moment de grâce !

Paris, le 29 Décembre 2015                Evelyne Trân

 

 

 

 

 

DON JUAN REVIENT DE LA GUERRE de Ödön von Horváth au THEATRE DE L’ATALANTE 10 place Charles Dullin, 75018 Paris du vendredi 11 au jeudi 17 décembre 2015

traduction Hélène Mauler et René Zahnd
Rep_DonJuan03_©andre-muller POUR SITEEditeur et agent théâtral L’Arche

Du vendredi 11 au jeudi 17 décembre 2015

 

 

 

 

Mise en scène et scénographie : Guy Pierre Couleau

Avec

Nils Öhlund, Carolina Pecheny, Jessica Vedel

 Assistant à la mise en scène : Bruno Journée
Création lumière : Laurent Schnee

Est-ce un effet de la confusion des genres, des réalités et des fantasmes, quel homme peut-il se reconnaître en Don Juan et être perçu comme tel par des femmes ? Dans la pièce de HORVATH, c’est l’inconscience, proche de la folie de DON JUAN qui se trouve à la porte de consciences de femmes. Le Don Juan qu’il met en scène au retour de la guerre de 14-18 est abattu, malade, il a une boule dans la gorge, une seule boussole pour avancer fiévreux, le souvenir de sa fiancée qu’il a abandonnée avant la guerre.

Au cours de ses tribulations, Don Juan antithèse d’Ulysse, qui ne retrouvera pas Pénélope, va rencontrer pas moins de 35 femmes auxquelles semble t-il, il ne pourra pas attacher d’importance parce que leur partition se trouve trop éloignée de son idéal forclos.

Le malheur des femmes nous dit HORVATH est que leur horizon est terrestre. Ces femmes qu’il découvre ont pris leur destin en mains, elles ont appris à se passer des hommes moralement et sexuellement, elles sont endurcies. Horwath ne leur fait-il pas dire : « La relation entre les sexes n’est plus du tout un problème, ce n’est rien qu’une fonction comme manger et boire ». Seule, une adolescente peut être véritablement tourmentée par le regard prédateur de Don Juan.

Et pourtant ces femmes qui aux yeux de Don Juan ne sont pas des vraies femmes, vibrent de toutes les maniéres. Elles pensent, elles agissent, elles se débattent, elles luttent pour vivre. Ce sont des infirmières, des veuves, des religieuses, des mères, des filles légères, elles tiennent même des propos politiques : « Et les millions de femmes dans les usines qui se fanent si jeunes, pour elles toutes , vous n’éprouvez aucun sentiment ? ! » s’exclame l’une d’elles. Tant il est vrai que pour Don Juan qui n’est pas un mythe, une femme digne de ce nom n’a pas le droit d’être laide.

HORVATH est contemporain d’un certain bouleversement de valeurs pendant la grande inflation 1919-1923, le malaise que porte en lui Don Juan, un homme du passé, fait partie de ces maladies de l’âme qui égarent l’esprit. Ne le sentait-il pas déraper l’esprit des hommes en Allemagne, sous l’emprise de l’idéologie nazie qui le conduit à s’exiler et à errer en Europe, avant de mourir bêtement assommé pa une branche lors d’une tornade à Paris en Juin 1938. Une tornade qui évoque bizarrement la mort de ce Don Juan venu se récuellir sur la tombe de sa fiancée en pleine tempête de neige.

Pas de romantisme élégiaque, pas de manichéisme chez HORVATH. La modernité de son écriture est étonnante.Les propos que tiennent les femmes qui jalonnent la route d’un Don Juan en prise avec le vide, cette énorme béance que représente son amour manqué avec sa fiancée, il semblerait qu’il les a entendus lui même . Leur virulence, leur violence prosaïque éclairent par contraste, une féminité inattendue chez Don Juan. A la même époque, Stringberg témoignait notamment dans sa pièce « Le père » du désir d’un homme de faire éclater le carcan de sa virilité supposée.

Mais en foulant sa propre image, devant un bonhomme de neige, parce que cela fait partie de nos rêves, la figure de Don Juan exalte encore la mémoire amoureuse des femmes.

Les bourgeons sont secs sur cette figure hivernale de Don Juan, gelés, ils appellent les larmes mais également dans une embellie visionnaire, le printemps de nouvelles femmes sur la scène d’action, la scène politique.

La direction des comédiens est remarquable qui permet de rendre compte de cette présence extrêmement physique des femmes qui embrassent la vie à mains nues face à un Don Juan toujours ailleurs, exprimant la solitude d’un être perçu comme un fantôme, un étranger.

Belle performance des comédiennes, Carolina Pecheny, Jessica Vedel qui endossent les rôles de toutes ces femmes, superbe incarnation par Nils Öhlund d’un Don Juan dans les nuages avec pour seuls vis à vis, des femmes.

Dans une mise en scène de Guy-Pierre COULEAU, nécessairement dépouillée, les tableaux s’enchaînent avec fluidité mais on entend se cogner les rêves de Don Juan contre la réalité de ces femmes de façon très prégnante. Les femmes parlent à travers Don Juan, et leurs propos résonnent d’autant plus qu’elles se heurtent à son autisme.

La sensibilité d’HORVATH totalement lucide donne à voir à entendre, les êtres dans leur épaisseur et leurs fragilités de façon naturaliste . Qu’est-ce à dire, une branche qui se casse, un sarment qui se plante dans la terre, un sourire de Don Juan à travers le regard de femmes, c’est aussi beau et cela en dépit des guerres, le restera, qu’un rayon de soleil sur la neige.

Se rendre là-bas dans cette forêt de femmes qui attendent Don Juan, voilà une aventure très enrichissante, palpitante à laquelle nous convie cette représentation inspirée de « Don Juan revient de la guerre » profondément émouvante.

Paris, le 20 Décembre 2015                         Evelyne Trân

Ne m’oublie pas de Bruno FOUGNIES – Mise en scène: Rubia MATIGNON – Au THEATRE DE MENILMONTANT – 15 Rue du Retrait 75020 PARIS – du Mardi au Mercredi 9 Décembre 2015 à 20 Heures 30 –

Avec:

Robert ABURBE, Lola ACCARDI, Michèle BOURDETNe m'oublie pas2-15

 

 « Ne m’oublie pas ! »  C’est un véritable nuage que cette interjection, un parapluie renversé qui voguerait sur l’eau pour une pluie de souvenirs à courir l’océan.

Zut, zut, j’ai oublié, j’ai oublié ce que je voulais vous dire alors je vais me raccrocher  au mot oubli, imaginer un champ d’oublis, oui, les oublis seraient des fleurs qui ne savent pas qu’elles sont des fleurs mais dans le murmure du vent, parait-il qu’elles chuchotent le mot oubli en hochant la tête.

Nymphe et Pussy, les deux héroïnes,  de la pièce de Bruno FOUGNIES,  peuvent bien  être associées à des fleurs. Toutes deux ont été danseuses autrefois dans le même cabaret, toutes deux ont succombé  au charme d’Orlando, le meneur de revue, qui leur donne un rendez-vous amoureux  dans sa maison de campagne. Mais oh surprise, Orlando a tout oublié et ne reconnait pas ses dulcinées …

C’est la déception, le désenchantement total pour les deux femmes qui voulaient renouer avec leurs souvenirs de jeunesse et leurs paillettes. Mais elles se ressaisissent et décident d’accompagner Orlando devenu innocent dans ce passé dont il se souvient encore, celui du music-hall…

Un sujet grave que celui de la maladie d’Alzheimer qui touche 900.000 personnes en France.  Bruno FOUGNIES qui signe une pièce légère et piquante ne s’est pas laissé impressionner par ce chiffre accablant. En tout cas à travers ses héroïnes qui trouvent le moyen de raccrocher Orlando à la vie,  une vraie lueur d’espoir illumine son propos.

  Dans une mise en scène menée tambour battant par Rubia Matignon, les deux comédiennes  Lola Accardi, Michèle Bourdet  drôles et sexy ont une pèche d’enfer et Robert Aburbe, Orlando est vraiment très touchant !

Bien jolie pièce qui d’une façon joyeuse, amicale et tendre nous dit tout simplement  » N’oublions pas ceux qui sont atteints de la maladie d’Alzheimer ! « .

Paris, le 18 Décembre 2015                                       Evelyne Trân

FIN DE SERIE par la Cotillard Compagnie au VINGTIEME THEATRE 7, rue des Plâtrières 75020 Paris du 10 Décembre 2015 au 10 Janvier 2016 du jeudi au samedi à 19h30 – dimanche à 15h00 Relâches les 24, 25 décembre et 1er janvier

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Mise en scène : Jean-Claude Cotillard
Décors : Charlotte Smoos
Accessoires : Monsieur QQ
Costumes : Agathe Laemmel
Création lumière : Julien Dubuc
Création son : Franck Combe
Audiovisuel : Guillaume Cotillard
Avec : Alan Boone, Jean-Claude Cotillard, Zazie Delem.
Coréalisation Vingtième Théâtre et Les Déchargeurs / le Pôle Diffusion
en accord avec La Cotillard Cie.

http://www.lepolediffusion.com/spectacle/fin-de-serie-1
Crédit visuel : Ifou – Le Pôle Média / Cotillard Cie

 

Curieux tableau que cet apparemment de vieux qui nous renvoie à une vision complètement à côté de la plaque de la modernité dont on nous serine les yeux et les oreilles.

Un appartement qui sent évidemment le vieux puisqu’ il reflète l’état d’esprit d’un couple qui joue la partition de la vieillesse, avec pour seule musique les clapotis d’un poisson dans son bocal, les ronronnements du chat et du micro ondes, les tic-tacs des pendules, les sifflements d’un oiseau en cage et quelques romances surannées.

On les croirait sortis d’une horloge parlante ou plutôt muette, les deux silhouettes de cet homme et cette femme qui par effet de mimétisme avec les animaux aussi inoffensifs que des meubles, apparaissent figés par leurs habitudes, leurs tics, la routine d’une vie sans éclat, et doivent se résigner à leur vilaine condition de vieux.

Les pauvres se connaissent trop bien pour désirer communiquer. Fort heureusement leur mauvaise humeur et leurs petites distractions accusent leur ridicule de façon très, très réjouissante.

Comme s’ils passaient à travers les mailles de leurs corps raides comme du carton, telles des marionnettes, les personnages se révèlent très expressifs.

Spectacle quasi muet, jubilatoire, fourmillant de gags sidérants, hilarants, notamment la scène où le couple sort de jolis sacs de pharmacie, une avalanche de médicaments.

Très inventive, superbement bien rythmée, la mise en scène met en relief tous ces petits motifs de la vie quotidienne d’un couple qui font mouche justement parce qu’il est impossible d’y échapper .

Alan BOONE campe avec beaucoup de drôlerie, le médecin, le kiné, l’agent de pompes funèbres au service commercial du brave couple. Quant à Jean- Claude COTILLARD et Zazie DELEM tous les deux extraordinaires, ils réussissent à rendre attachante cette caricature de la vieillesse.

C’est tout le charme de ce spectacle qui fait exploser de rire ces vers célèbres de Corneille « ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ? »

Paris, le 13 Décembre 2015              Evelyne Trân

LES MISSIONS D’UN MENDIANT mise en scène Olivier Couder, Richard Leteurtre Du mar. 08/12/15 au sam. 19/12/15 à L’Etoile du Nord 16 rue Georgette Agutte 75018 PARIS

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Les mardis, mercredis et vendredis à 20h30   Les jeudis à 19h30   Les samedis à 17h00

mise en scène :
Un tabouret à trois pieds et Je dis je  :
Richard Leteurtre
Avis aux intéressés  :
Olivier Couder
La visite :
Olivier Couder et Natacha Mircovich  :

Avec : Francis Auvray, Peter Bonke, Olivier Couder, Stéphane Guerin, Coralie Moreau, Anne Peneveyre, Emmanuel Viennot de Vaublanc et Gabriel Xerri.

Dominique Massa (Création son) , Natacha Mircovich (Assistant(e) à la mise en scène) , Marie-Hélène Pinon (Création lumières) , Jean-Pierre Schneider (Scénographie) Atelier Eurydice (Décor et costumes)

Être handicapé qu’est ce que cela signifie, avoir perdu la main, avoir besoin d’être tenu par la main ? Je me souviens d’une étudiante souvent accompagnée par une aveugle et une handicapée moteur, qui avait été qualifiée d’inadaptée avec commisération par son professeur d’université qui la jugeait incapable de poursuivre des études. Il n’était pas submergé évidemment par le brouhaha de son psychisme, il se coltinait le connu, il paraphrasait ce qu’il lisait, il aurait traité de même le singulier ARTAUD.

Le Théâtre EURYDICE et le Théâtre du CRISTAL présentent 4 pièces courtes de Daniel KEENE, toutes interprètes par des comédiens professionnels en situation d’handicap hormis Peter BONKE et Olivier COUDER.

A une époque où la performance des outils technologiques pourrait bien finir par occulter nos fragilités humaines, il est bienvenu de pouvoir entendre les témoignages de ceux qui sont véritablement en quête d’âme, d’amour, d’identité, bien davantage que de confort domestique ou matériel.

Faudrait-il donc qu’ils rendent l’âme le père condamné et son fils autiste mis en scène dans  »Avis aux intéressés » parce que justement leur solitude extrême, leur malheur n’intéressent personne.

Que dire de la jeune fille qui dans le monologue « Je dis je » exprime sa détresse aussi poétiquement que la sirène d’Andersen.

Extrêmement sensible également dans la pièce la Visite, ce dialogue entre le père et sa fille, tous deux troublés par l’idée qu’ils doivent se séparer lors de la visite de la fille à la Mère.

Dans le tabouret à trois pieds, deux jeunes S.D.F s’interrogent à propos d’un troisième plus âgé qui fait office d’étranger, l’un manifestant son hostilité, l’autre au contraire une fascination étrange.

Avec juste une estrade mobile et un éclairage en demi teinte , les deux metteurs en scène Richard LETEURTRE et Olivier COUDER réussissent à traduire sans aucun artifice, à éclairer ces rapprochements humains diffus, sous-jacents, intimes. Ce sont de véritables tableaux d’une délicatesse fourmillante. Du coup tous les propos des personnages restent légers, ils ne recherchent pas l’effet, ils sont naturellement expressifs.

On a l’impression que les personnages de Daniel KEENE ne disent que ce qu’ils peuvent dire. L’onde reste intime, souterraine, celle qui laisse passer quelques mots, quelques pensées et les gestes, les mouvements du corps personnel se révèlent aussi messagers , aussi demandeurs d’écoute, d’attention .

Nous garderons en mémoire ces magnifiques tableaux tels des paysages à visages humains parce qu’ils reflètent encore mieux qu’un fleuve, qu’une flaque d’eau, cette curieuse sensation d’être au monde, à la vie .

Est-ce un effet de compensation, les personnes en handicap disposent souvent d’une sensitivité supérieure à la norme. Nous en avons la preuve avec ces comédiens d’une présence étonnante sur scène . Nous saluerons également les compositions de Peter BONKE en père condamné et mendiant, il est excellent.

Vraiment un très beau spectacle tout public. Ajoutons que le Théâtre de Cristal vient d’éditer un journal « La vie comme un journal » qui donne la paroles aux artistes à travers des poèmes, des histoires courtes, de jolies illustrations, d’une facture très, très attrayante.

Paris, le 13 Décembre 2015              Evelyne Trân

JAURÈS OU LA NECESSITE DU COMBAT, RALLUMER TOUS LES SOLEILS de Jérôme Pellissier Au THEATRE DE L’EPEE DE BOIS – CARTOUCHERIE DE VINCENNES – du 30 novembre au 16 décembre 2015

JAURES BIS

Auteur : Jerôme Pellissier
Artistes : Eric Wolfer, Alexandre Palma-Salas, Milena Vlach, Guillaume Van’t Hoff, François Perrin
Metteur en scène : Milena Vlach assistée d’Eleonora Ross

 

On en aurait bien besoin de Jean JAURES aujourd’hui. Qui ça on, le paysage politique français, évidemment ! En tout cas c’est le sentiment qui submerge  des spectateurs  venus assister à une représentation de RALLUMER TOUS LE SOLEILS JEAN JAURES OU LA NECESSITE DU COMBAT  de Jérôme PELLISSIER dans la superbe salle en pierre du Théâtre de l’Epée de bois.

La pièce évoque essentiellement les combats menés par Jean JAURES depuis l’affaire DREYFUS  au premier mois de de la guerre de 1914. Pour les illustrer, il suffit d écouter les discours de Jean JAURES lui-même, orateur hors pair sur la laïcité, le colonialisme, l’antisémitisme, la xénophobie.

Jérôme  PELLISSIER a certainement désiré au delà de la figure du tribun politique panthéonisé, rendre compte de la générosité, du courage et de l’intégrité de cet homme qui aimait les hommes, croyait en l’humanité d’où le titre du journal L’HUMANITE qu’il fondât avec une pléiade d’écrivains en 1904.

Sans nul doute c’est le type d’homme qui inspira CAMUS lui même journaliste à Combat. JAURES était en avance sur son temps, notamment lorsqu’il dénonçait le colonialisme, le nationalisme extrémiste . Comment oublier qu’il fit partie des rédacteurs de la Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État et qu’il s’engagea dans la défense de DREYFUS.

La beauté vive et franche du mur de la scène de l’Épée de bois sied à la figure de Jean JAURES, à la fois homme de peuple et bourgeois.  L’espace est frugal, l’histoire se resserrant juste autour de quelques personnages, Charles PEGUY ami puis ennemi de JAURES , DUNOIS, le frère spirituel, Eva JOUARD, journaliste féministe et GAVROCHE vendeur de journaux dans les rues ,qui fait office de narrateur, exprimant par des chansons l’atmosphère de l’époque.

JAURES était un homme d’idées, de grandes idées, il avait un pied sur terre grâce à son journal, véritable oreille des combats de ceux qui ont œuvré pour les droits des travailleurs. « L’humanité n’existe pas encore ou elle existe à peine … nous voudrions que le journal soit en communication constante avec tout le mouvement ouvrier, syndical ou coopératif »  écrivait-il dans son premier éditorial de L’HUMANITE, le 18 Avril 1904.

Son assassinat à la veille de la guerre de 14 alors qu’il combattait toujours pour l’empêcher, parce qu’il avait la terrible prémonition de ses désastres, a fini par jeter l’éponge sur un homme d’action jugé trop idéaliste, voire trop optimiste, par nombre de ses confrères politiques. Mais TROTSKY, le communiste le plus rouge, l’admirait, avait conscience de la valeur de son idéal pacifiste.

Tous les combats que JAURES a mené contre l’obscurantisme des intellectuels d’extrême droite, xénophobes, antisémites, comment les juger idéalistes, nous qui avons en mémoire la Shoah et devons subir les discours de ceux qui continuent à prendre pour boucs émissaires les étrangers de tous les maux de la société. A un siècle de distance et dieu sait que la société a évolué, ce sont les mêmes débats qui la mobilisent, qui font resurgir les mêmes peurs, qui font entendre les mêmes cloches.

Des milliers de rues, avenues, boulevards Jean Jaurès jalonnent les villes de France, de façon anodine mais celui qui n’a pas de culture politique sait seulement qu’il s’agit d’un grand homme qui fait partie de l’histoire de France . Qui frémit encore en lisant sur la ligne 2 du métro que la station Jaurès se situe entre Stalingrad et le Colonel Fabien ?

Le spectacle s’adresse justement à ceux qui ont envie d’en savoir davantage sur cet homme . Grâce à son interprète Eric WOLFER qui dispose d’une belle voix puissante , c’est non seulement l’ampleur, le sens mais l’émotion du tribun qui frappent, captivent les auditeurs. Il n’avait pas la langue de bois, JAURES, et ses discours sont empreints de la chaleur d’un bon vivant. La vie, il faut l’entendre aussi, c’est le théâtre de la rue, le va et vient des événements narrés par un vendeur de journaux, cette figure énigmatique de Gavroche superbement incarnée par Guillaume van ‘t Hoff.

La mise en scène de Milena VLACH est dépouillée, volontairement non réaliste, concentrée sur l’état de tension permanent qui animait JAURES comme s’il voulait toujours prendre le pouls de la société à la fois comme journaliste et homme politique, ce qui n’est pas une mince affaire.

Mais les piles de journaux aplaties, concassées font un clin d’œil au beau mur de pierres de la salle de l’Épée de Bois, grandiose car chacune de ses pierres évoque le chantier humaniste de JAURES, ici le mot mur parle du travail des mains de beaucoup de travailleurs pour s’élever, eh oui, vers un idéal qui ne soit pas sournois mais qui tienne debout leur mémoire, leur présence quoiqu’il arrive !

Un beau spectacle instructif, passionnant, passionné, à voir de toute urgence !

Paris, le 12 Décembre 2015               Evelyne Trân

 

Carte blanche à Marc-Henri LAMANDE, le mercredi 9 décembre 2015 à 21h au Théâtre de la Reine Blanche – passage Ruelle 75018 PARIS

artaud

 

 

 

 

NB : Marc-Henri LAMANDE était l’invité de l’émission DEUX SOUS DE SCENE SUR RADIO LIBERTAIRE 89.4, le samedi 28 Novembre 2015,( en podcast sur le site ‘Grille des émissions de R.L.).

ARTO TOTEM

UNE CRÉATION DE MARC-HENRI LAMANDE ET ANTOINE CAMPO

« Antonin Artaud aura 120 ans en 2016. Nous préparons activement la fête avec des feux de musique, des bengales de mots et des chants d’images. Soyez les premiers à venir célébrer l’immense Artaud qui nous interroge plus que jamais sur le présent éternel de cet art nommé théâtre. Cette création aurait pu s’intituler Artaud et son double. Marc-Henri Lamande donne à entendre la voix mais aussi l’humour, il incarne l’artiste qui fit don de sa vie à la création poétique et théâtrale. »

 Distribution :

MARC-HENRI LAMANDE, PIANO IMPROVISÉ ET INTERPRÉTATION

ANTOINE CAMPO, MISE EN SCENE, SCÉNO ET LUMIÈRES

FILM : SANDRINE ROMET-LEMONNE, ASSISTÉ DE JÉRÔME JAVELLE

CRÉATION PHOTOGRAPHIQUE : STUDIO CAMPO ET BURCKEL

CHORÉGRAPHIE : KATHY MÉPUIS

 

Album de Famille – Mise en scène par Isabelle Turschwell et Lauri Lupi au THEATRE DU LUCERNAIRE – 53, rue Notre-Dame des Champs 75006 PARIS -Du 02/12/15 au 24/01/16 à 19 Heures du Mardi au Samedi, le Dimanche à 15 Heures

téléchargement (3)

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N.B. : Isabelle Turschwell,  Stéphanie Cavaillès, Gildas Thomas,Vincent Hédou étaient les invités de l’émission DEUX SOUS DE SCENE en première partie, le samedi 19 décembre 2015 sur Radio Libertaire (89.4)  (en podcast sur le site Grille des émissions de Radio Libertaire).

Artistes : En alternance : Mariline GourdonIsabelle TurschwellCamille VoitellierStéphanie CavaillesPhilippe GouinGildas ThomasRubenVincent Hedou
Metteur en scène : 
Isabelle Tuschwell et Lauri Lupi

 

C’est intime, c’est sacré la famille, non franchement c’est pas évident de l’évoquer à des tiers, à des étrangers à ceux qui ne font pas partie de la famille.

Qui n’a pas connu cet instant fatidique où après un bon repas, la maîtresse de maison sort d’un placard l’album familial . Aussitôt petits et grands se penchent au-dessus des photos qui font pleuvoir toutes sortes de commentaires. Les petits découvrent des figures inconnues, les plus âgés sourient s’embuent de larmes, certains s’éclipsent…

L’émotion gagne du terrain quand tout à coup l’album poussiéreux qui manifestement a envie de prendre l’air, devient un arbre à chansons. Quel bonheur de pouvoir exprimer en chansons tous ces non dits, ces sentiments, ces souvenirs trop figés sur leur album de photos et de pouvoir enfin les partager avec tous les étrangers possibles !

Qui eût cru que des auteurs aussi différents que Sardou, Polnareff, Brassens, Dutronc, Brel, Perret etc. pouvaient être réunis par la grâce d’une de leurs chansons évoquant, maman, papa, la sœur, le frère, le grand-papa et la grand- maman, une famille ordinaire, voyons !

Les comédiens chanteurs de la compagnie du Sans Souci, parfaitement entraînés par les metteures en scène Isabelle TURSCHWELL et Lauri LUPI, ont une pèche d’enfer . Les chansons cocasses, tendres, insolentes font si bien partie de la comédie musicale de cette famille ordinaire que nous croyons que chacun de ses membres en sont les auteurs. Ne parlent-elles pas de leurs embrouilles, de leurs joies, de leurs attentes …

Il est succulent Le blues de l’ado (V. Ansara/A. Nozière/S. Barbaroux ) interprété par Camille VOITELLIER (en alternance avec Stéphanie CAVAILLES) . Il faudrait avoir le cœur bien coincé pour ne pas être émus par le Zoo (David Sire) qui raconte les chamailleries d’un frère et d’une sœur et l’Histoire de roses (Robert Lamoureux) qui parle du départ de la grand-mère et ne pas rire aux larmes avec la chanson Dors mon fils (Les Fatals Picards) .

Voilà un spectacle qui donne du baume au cœur, un véritable artifice de gaîté, d’humour, de poésie. A voir en famille évidemment. Quand nos airs de famille se déclinent en chansons comment ne pas se reconnaître !

Paris, le 7 Décembre 2015                             Evelyne Trân