NOUVEAU HEROS Texte et mise en scène de Nicolas Kerszenbaum : du 4 au 24 juillet 2015 à 12 H 15 au Festival Off d’AVIGNON à l’Espace ALYA – 31 Bis rue Guillaume Puy 84000 AVIGNON –

NOUVEAU HEROS

Avec Bertrand Barré

Production
Compagnie franchement, tu
Theatre de la Poudrerie (Sevran)
avec l’aide de la Maison des Metallos
et de En Cours

La belle affiche du nouveau héros est énigmatique. L’on y voit deux figures, l’une moustachue et l’autre dotée d’un joli sourire à la Joconde, têtes bèche, reliées par le ventre.

Jolie image d’Epinal pour annoncer un spectacle qui va nous parler d’un monstre de l’Antiquité, un demi-dieu, Hercule réincarné en nouveau héros de notre belle époque.

L’auteur et metteur en scène de la pièce, Nicolas KERSZENBAUM, à vrai dire n’ a eu qu’à agiter sa baguette de sourcier à SEVRAN, en recueillant les témoignages de ses habitants jeunes ou vieux, femmes ou hommes, pour faire sourdre l’esprit du bel Hercule toujours très vivace, en leur posant toujours la même question « Vous êtes un homme/une femme, qu’est ce qui aurait changé dans votre vie si vous aviez été un homme/une femme ? « 

Les époques peuvent bien ajuster leurs décors, le mythe d’hercule perdure et c’est normal, il a pour vitrine un pénis qui tel une grenouille qui voudrait être aussi grosse qu’un bœuf se met à grossir dès qu’on le flatte.

Hercule né à SEVRAN des amours adultères de Jupiter avec Alcmène, une humaine, a toujours entendu dire qu’il était le plus beau, le plus fort. Que son modèle antique ait pu tué sa femme et ses enfants un soir de folie ne suffit pas à racornir son image, seuls sont restés dans nos mémoires, les douze travaux d’Hercule.

Tout de même notre Hercule des temps modernes a une lourde charge héréditaire, un père coureur de jupons et la femme de ce dernier, une Junon, sorcière qui va se venger sur lui en le transformant en femme. Quelle horreur ! Imaginez Hercule qui se réveille sans sexe, enfin sans pénis, oui c’est affreux !

Il faut toute l’ingéniosité d’un auteur aussi perspicace que Nicolas KERSZENBAUM pour faire passer la pilule en douceur et cela va sans dire un comédien caméléon capable d’endosser 14 personnages, du tapis de l’Antiquité à nos jours.

Bertrand BARRE n’a besoin que de quelques playmobiles et d’une dizaine de poupées barbies pour mettre en branle tout ce monde avec une ironie, une drôlerie, un humour à toute épreuve. Il est génial !

Voilà un spectacle original à ne pas manquer car sous couvert du conte, il en dit long sur nos complexes sexuels, identitaires. C’est évident, l’homme et la femme ne sont qu’une pomme coupée en deux, ils forment le même fruit et nous mordons dedans, grâce à cette fable avec bonheur !

Paris,  le 15 Juillet 2015                                                  Evelyne Trân

HAUTE AUTRICHE de Franz-Xaver Kroetz par la Compagnie l’Echappée Théâtre du Rempart 56, rue du Rempart Saint-Lazare – 84000 Avignon du 4 au 26 Juillet 2015

 

haute_autriche5Écriture : Franz-Xaver-KROETZ
Mise en scène : Didier PERRIER
Interprétation : Mélanie FAYE, Laurent NOUZILLE


Musique originale : Chantal LAXENAIRE
Mise en lumière : Jérôme BERTIN
Scénographie : Olivier DROUX
Régie son/vidéo : ANTOINE GÉRARD
Costumes : Céline KARTÈS
Photographie : Amin TOULORS
Création sonore : Hélène COEUR
Affiche : Alan DUCARRE

Diffusion : Pascale HAREN
Secrétariat : Sylvie BORDESSOULLE
Administration : Marion HARDY

Ministère de la culture / DRAC Picardie

Y a-t-il une symphonie du quotidien, de sa grisaille et de ses surprises inespérées ? Métro, boulot, dodo, voila une rengaine que nous croyons incompressible. Au théâtre pourtant, les visages cernés de ces gens anonymes peuvent s’animer de façon incroyable. Ils peuvent même devenir les héros d’une comédie dramatique. Ce sont ces gens là, apparemment insignifiants, les passe partout qui intéressent le dramaturge Franz –Xaver KROETZ .

Le lieu clos d’un appartement qui sans être misérable respire la pauvreté, devient la scène d’instants de vie d’un jeune couple amoureux.

Mais il n’y a pas de romans sans histoires, sans drames. Ici , le drame, c’est la pauvreté. Pas seulement la pauvreté matérielle, la pauvreté d’horizon.

Sans rêves, sans désirs, les hommes ne peuvent tenir debout ! Et c’est vrai aussi pour tous les êtres vivants. L’homme rêve d’ascension sociale, la femme d’objets de consommation …

L’appartement nu où l’on entend les gloussements d’amour du jeune couple au fur à mesure laisse transparaitre les ombres des chaines qui vont semer le trouble dans le foyer.

Ici les murs ont des oreilles, ils voient tout et ne jugent pas. Ils accueillent le cadeau d’anniversaire, une corbeille de fruits en porcelaine, ils la voient se remplir et ils assistent à sa disparition. Ils entendent le couple faire l’amour réver de voyages, faire leurs comptes, manger à table, la routine … Et puis un jour, l’homme et le femme crient, ils ne sont pas d’accord sur une question très grave, celle d’accueillir ou non un enfant, le leur.

Le regard de l’auteur et la mise en scène de Didier PERIER qui couve et recouvre les va et vient d’ ombres et lumières dans cet appartement, font l’effet de passe murailles.

Il y a de très beaux chants portés par la voix de Chantal LAXENAIRE qui accompagnent chaque changement de situation. L’appartement semble tourner comme un manège; chaque quartier de scène va défroisser au fur et à mesure des pans de personnalité de l’homme et de la femme. A la fin de la pièce, nous restons tout étonnés d’avoir assisté à leur transformation.

Véritable performance de la part des comédiens Mélanie FAYE, Laurent NOUZILLE qui progressivement passent de l’innocence à la révolte, de l’épreuve à l’espérance, de la soumission à la résistance.

Quelle prise sur la vie ? Quelle batterie ? Quel sang ? Oui, c’est bien le nôtre et on y voit courir la tache de la pauvreté qui n’est pas seulement visible, qui s’insinue dans les pensées, les comportements, les actions de tous les jours, et qui bride , bride ne cesse de brider l’espérance de vie. A cet égard là, le regard de KROETZ est politique, il ouvre la blessure car il y a des plaies et la pauvreté en est une qu’il faut regarder en face.

Un spectacle intense et remuant , porté par des interprètes qui jouent comme s’ils jouaient la peau de leurs personnages, c’est formidable !

Paris, le 13 Juillet 2015 Evelyne Trân

 

DON JUAN DE MOLIERE par la COMPAGNIE LES GOSSES au Chapeau d’Ebène Théâtre – 13, rue de la Velouterie – 84000 Avignon Du 4 au 26 juillet 2015 à 18 H 45

DON JUAN BIS

Avec Stephen Szekely (Dom Juan), Olivier Mellor (Sganarelle, Charlotte)
Stéphane Piasentin (Elvire, Gusman, Don Louis, le pauvre, Charlotte, Mathurine, Pierrot, la statue du Commandeur, M. Dimanche)
Mise en scène : Karine Dedeurwaerder
Croyez vous encore à Don Juan ? Naturellement, sommes nous censés répondre. Cette créature est humaine et si vous avez envie de croire en l’homme plutôt qu’à un Dieu hélas invisible, pourquoi ne révériez vous pas le Don Juan de Molière ?

Parce que ce personnage qui clame sa liberté de vivre comme il l’entend n’a pas encre créé de véritable église et que sa liberté de pensée a des résonances individualistes, voire égoïstes , amorales, asociales.

C’est une étrange comédie que cette pièce de Molière où l’on voit un valet Sganarelle deviser philosophie avec son maître, un seigneur gâté, qui n’ a en tête que l’assouvissement de ses désirs.

Curieux jeu de miroirs et brouillard existentiel où s’enchevêtrent les peurs d’un valet et l’inconscience d’un petit seigneur .

Sur la balance, toujours en binôme pour se contredire, le pauvre et le riche, la jouissance ou la luxure, l’un des 7 péchés capitaux, la crainte de l’enfer. C’est peu dire, le poids de la religion .

Philosopher en jouant la comédie de la vie, toujours sur des tisons ardents, tel semble être le nerf de guerre de Molière qui ne cesse de composer avec sa propre fureur de vivre et les pouvoirs en place. Souvenons nous que les rois avaient la bénédiction des dieux et que Molière ne pouvait créer sans l’accord du roi Louis XIV.

Mais nous pouvons faire l’impasse du contexte historique, la pièce de Molière s’entend à travers les déclarations de foi ou de doute de pauvre bougres, qu’ils soient seigneurs ou valets.

« Si Dieu n’existe pas, alors tout est permis » s’écrie un personnage de Dostoïevski dans les Frères Karamazov. Et cela sonne comme un aveu de détresse. Le génie de Molière c’est de pouvoir faire entendre cette alarme du cœur et de l’esprit en laissant vagabonder ses personnages.

La mise en scène très fine de Karine DEDEURWAERDER laisse jaillir l’esprit de Molière comme autant de petites flammèches de vie exécutées par des interprètes étourdissants d’humanité. Il y a un tel brassage d’états d’âmes que nous pourrions nous croire à la foire, à une fête foraine. Ouvrant grandes les voiles, Karine DEDEURWAERDER laisse même s’engouffrer sur une musique disco, la voix chaude et passionnée de Dalida.

Son Don Juan de poche sur tréteaux met en valeur l’essence même de Molière, son verbe qui n’a pas besoin de décors fastueux, qui peut même passer à travers le trou d’une serrure, tel un feu follet virulent, délirant, spontané.

A cet égard, Stéphane PIASANTIN inaugure toutes ces facettes en endossant avec virtuosité aussi bien Elvire, que le commandeur, le pauvre, le père etc…

Stephen SZEKELY est un Don Juan qui ne cache pas ses faiblesses, et en cela il reste sympathique, tandis que le Sganarelle joué par Olivier MELLOR fait penser que s’il n’avait pas été valet, par un obscur concours de circonstances, il aurait pu faire partie comme Don Juan de ses politiques opportunistes et pragmatiques, sans foi ni loi derrière leurs couvertures.

Menée tambour battant comme une comédie delle arte, avec d’excellents comédiens, voilà là une mise en scène de Don Juan très rafraichissante, qui dégourdit l’esprit et peut être goûtée sans modération en famille. Ici Molière n’a pas besoin d’être dépoussiéré, il respire !

Paris, le 13 Juillet 2015                     Evelyne Trân

 

 

Anne Baquet, Non, je ne veux pas chanter au THEATRE DU LUCERNAIRE – 53, rue Notre Dame des Champs 75006 PARIS – Du 1er juillet au 9 août Du mardi au samedi à 19h Le dimanche à 15h

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De et avec : Anne Baquet, accompagnée au piano par Grégoire Baumberger
Mise en scène : Claudine Allegra

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Durée : 1h20

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Si vous êtes en quête de fraicheur en cettte période de canicule, voici une bonne adresse, celle d’Anne BAQUET au Théâtre du Lucernaire.

Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants dit Baudelaire, et le moins que l’on puisse dire c’est que le spectacle d’Anne BAQUET lui fait écho avec beaucoup de charme.

Mise en scène par Claudine ALLEGRA, accompagnée au piano par Grégoire BAUMBERGER, très bon mime et comédien à l’occasion, Anne BAQUET gambade comme une petite fille à travers un champ éclectique et très fantaisiste de chansons cueillies, humées , adorées tout le long de son parcours.

Les musiques de Rossini, Wagner, Poulenc, Chopin, Rachmaninov, Poulenc … se chevauchent allègrement autour d’un éventail de poésies chantées avec des clins d’oeil de Prévert, Topor, Pierre Duamyet, Jean Nohain, J.Barbier et M.Carré et tant d’autres.

Beaucoup d’airs connus revisités par la présence d’Anne BAQUET, véritable Alice au pays des Merveilles qui enchante par son naturel, sa malice, sa gaieté.

Le public charmé en redemande et serait prêt à entonner en chœur avec Anne BAQUET “Non je ne veux pas chanter…”. Et pour les personnes qui chantent faux, souligne une comptine, elles ne peuvent être que bienvenues pour faire venir la pluie, pluie en chansons bien entendu !

Paris, le 4 Juillet 2015    Evelyne Trân

24 heures de la vie d’une femme d’après Stefan ZWEIG au THEATRE DE LA BRUYERE – 5, rue de La Bruyère 75009 PARIS, du 1er juillet au 1er août 2015 du mardi au vendredi à 20 H 30, les samedis à 17 H et 20 H 30.

affiche THEÄTRE LA BRUYERE

Mise en scène Franck BERTHIER
Adaptation, livret et paroles Christine KHANDJIAN et Stéphane Ly-CUONG
Décor Franck BERTHIER
Musique Sergeï DREZNIN

avec Isabelle GEORGES, Frederik STEENBRINK, Olivier RUIDAVET
Accompagnés par Yann OLLIVO (arrangements, direction musicale et piano), Naaman SLUCHIN (violon) et Isabelle SAJOT (violoncelle)
– See more at: http://www.theatrelabruyere.com/spectacles/24heures.php#sthash.tYF3pRaI.dpuf

Une belle surprise que cette adaptation musicale de “Vingt quatre heures de la vie d’une femme” de Stefan Zweig, en tous points réussie. Cette nouvelle une des plus connues de Stefan ZWEIG est déjà en soi une véritable partition, un voyage, une escapade dans un de ces paysages intérieurs d’une femme mûre en proie à une passion fulgurante pour un jeune homme .

Ce qui est passionnant dans cette nouvelle c’est de vivre comment une femme “ordinaire” et respectable qui n’ a rien d’une Phèdre ou d’une coquette, s’oublie et se découvre à la fois en allant au devant d’un inconnu impossible.

Il s’agit d’une femme courageuse qui ne craint pas de tout donner, tout perdre pour seulement vivre vingt quatre heures avec l’homme aimé. A la lecture, souvenons nous, nous avons éprouvé seconde par seconde, minute par minute, la tension amoureuse de cette femme délicate, timide et pudique comme si nous lui tenions la main. Nous savons que cette femme existe, peu importe son âge, sa condition, elle pourrait même être moche, ce qui compte pour Stefan ZWEIG c’est son visage intérieur qu’il scrute avec un mélange de compassion et d’envie, cette même envie qui dévore son héroïne  face au jeune homme.

Grâce à Stefan ZWEIG nous allons aussi au devant de cette eau qui dort sans doute chez toute femme ou chez tout homme et qui parfois crépite on ne sait pourquoi comme Verlaine dans son poème “Mon rêve familier”.

Bannie la mièvrerie, la passion est convulsive, violente, destructrice, c’est en observant le visage du jeune homme exalté par la folie du jeu, que l’héroïne fait remonter à la surface sa propre énergie amoureuse.

Isabelle GEORGES, à la fois sensuelle et réservée entre souverainement dans ce personnage.Elle lui apporte sa stature, sa voix chaude et aussi son mystère. Son partenaire, Frédérik STEENBRINK quant à lui compose le jeune homme déchiré avec une belle ardeur. Olivier RUIDAVET a l’élégance du témoin ému malgré lui par la confession inouïe de l’héroïne.

Parfaitement équilibrée, la mise en scène fait frémir l’écrin de cette histoire d’amour avec les phrases musicales de Sergeï DREZNIN servies par un trio de concertistes talentueux, en symbiose, au piano, violon et violoncelle.

Un spectacle, véritable bouffée d’air à la Verlaine, pénétrante et chaleureuse. Mais que les spectateurs se rassurent, la salle du Théâtre de la Bruyère est climatisée, ils n’auront chaud qu’au cœur de leurs précieux mirages !

Paris, le  4 Juillet 2015                                            Evelyne Trân

LES DEMONS DE LARS NOREN au THEATRE DU LUCERNAIRE – 53 Rue Notre Dame des Champs 75006 Paris Du 13 mai au 4 juillet 2015 Du mardi au samedi à 21h

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Rencontre avec l’équipe artistique le vendredi 15 mai à l’issue de la représentation.

Auteur : Lars Norén
Mise en scène : Cyril le Grix
Traduction : Louis-Charles Sirjacq et Per Nygren (avec l’accord de L’Arche, éditeur et agent théâtral du texte représenté)
Avec : Xavier Bazin, Thibaut Corrion, Maud Imbert, Carole Schaal

Quand la vie conjugale devient infernale, usée par la routine, Eros et Thanatos, ces démons mythiques s’amusent à agiter les chaines, sortes de courroies muselières, instruments de tortures, sado masochistes qui sortent de leurs gonds révélant la chair flasque de leurs protagonistes.

Dans la pièce de Lars NOREN, Eros et Thanatos forment un couple sans gêne, incarné au premier plan par celui que forment Franck et Katarina, pris au piège de leurs rancoeurs intestines, n’arrivant plus à s’atteindre qu’en se blessant, et au 2ème plan par celui de Tomas et Jenna, terriblement humains et désespérément  conventionnels.

Le premier couple plus libéré en apparence, invite le second à partager une soirée dans leur appartement .Ils n’ont rien à se dire, puis l’alcool aidant, leurs démons vont prendre la parole. Frank et Katarina qui les connaissent bien peuvent jouir de leurs effets sur Tomas et Jenna, les nouveaux cobayes.

Le plus conscient de tous semble être Frank dans un rôle suffoquant celui d’exister en chair et en vide face à l’urne funéraire qui contient les cendres de sa mère fraîchement décédée.

Joindre les gestes à la parole, est ce possible ? Rappeler sa mère en jetant ses cendres comme un paquet de poussière sur la tête de sa maitresse, c’est atroce ! Parce que la mort est là, tout est possible suggère Lars NOREN.

L’action sacrilège qui ne peut se souvenir d’elle même que dans le huis clos d’un appartement reflet de la conscience de ses occupants, devient libératoire, comme si en répandant les cendres de sa mère, l’homme retrouvait le geste innocent de celui qui va pouvoir venir boire à la source.

Du coup toutes les effusions grotesques, les intrigants manèges du corps et de l’esprit laissent pantois aussi bien les protagonistes que le spectateur.

Tout ça pour ça. Ici, la vérité ne sort pas de la bouche d’un enfant mais de scènes de ménage . Curieuses longueurs d’ondes que cclles du sexe et de l’habitude, qui laissent désarmé l’individu face à lui même, à la solitude, à la mort.

Cela dit, un esprit de conquête et de jeunesse règne dans cette pièce.Il faut observer le couple coincé s’encanailler pour comprendre comment il a suffi d’une anodine brèche pour allumer l’oeil de celui qui se tient de l’autre côté du miroir.

C’est le rôle délicat aussi qui revient au metteur en scène Cyril Le Grix, qui donne carte blanche aux comédiens tous remarquables, chacun dans leurs compositions. Thibaut CORRION, Frank, est à la fois inquiétant et lumineux, Carole SCHAAL, Katarina a l’allure d’une mante religieuse à la fois splendide et fragile, Maud IMBERT, Jenna, très émouvante en sainte Nitouche qui se libère, et Xavier BAZIN, Tomas, tout à fait tordant en pauvre type bourré de tics.

Impossible à décrire, cette pièce est à voir, à boire, à éprouver. Aussi noirs soient-ils, voilà des démons qui se tranforment à vue d’oeil, passant du tragique au comique avec une dextérité naturellement démoniaque. Il y a cette scène fabuleuse où Frank et Tomas se lancent un vase infâme tout en parlant, sans jamais le laisser choir. Jeu de récréation en somme, lueur d’espoir à travers un champ de possibles qui se regénère de lui même. Ainsi va la vie selon Lars Noren, l’oeil fixé de l’autre côté du miroir.

Paris, le 3 Juillet 2015                Evelyne Trân