TILT de Sébastien THIERY – MISE EN SCENE JEAN-LOUIS BENOIT – au THEATRE POCHE de MONTPARNASSE – Du 13 Décembre 2013 au 1er Mars 2014 – du mardi au samedi 21h, dimanche 15h

  • tilt afficheBruno Solo
  • Sébastien Thiéry
  • Antony Cochin
  • Décors : Jean Haas – Lumières : Jacques Puisais – Costumes : Marie Sartoux
  • Prix des places de 10 à 35€
  • Coproduction Théâtre de Poche-Montparnasse et Robin Product

 

 

Sébastien THIERY possède l’art d’enfouir, comme une fève, le détail  qui va d’un zeste magique transformer la situation la plus banale, la plus morose,  en circonstance extraordinaire.

 Les personnages de ses sketches, tristes et solitaires, passe partout et ordinaires n’échappent pas à la règle. Est-ce pour ne pas se dissoudre complètement dans l’atmosphère  qu’ils ont pris l’habitude de prendre leurs rêves pour des réalités et vice versa.

 Ils ne font que quelques entorses à la réalité, si légères d’ailleurs qu’elles ne risquent pas de changer le monde. Par exemple, si votre femme avait une tête de chouette au propre comme au  figuré, croyez vous vraiment que cela changerait quelque chose à votre vie de couple ?

 Par le truchement de dialogues pince sans rire, les personnages  prennent de plus en plus consistance, et c’est un plaisir d’assister aux couinements existentiels des deux «affreux » énergumènes  capables, le plus naturellement du monde, d’atteindre le sommet par les voies divines ou démoniaques.

 Sébastien THIERY et  Bruno SOLO, rendent attachants ces monstres qui culbutent notre quotidien, au pas de course. Ils y vont à l’estomac et  c’est cruellement drôle. C’est aussi tellement réconfortant de penser qu’il y a toujours plus fou que soi.

 La mise en scène au cordeau ne laisse aucun répit aux spectateurs qui rient de bon cœur. Un spectacle jubilatoire qui éreinte notre morosité !

 Paris, le 30 Décembre 2013       Evelyne Trân

 

 

QUI ES-TU FRITZ HABER d’après le nuage vert de Claude COHEN – Mise en scène de Xavier LEMAIRE au THEATRE POCHE de MONTPARNASSE jusqu’au 6 Janvier 2014 à 21 H du mardi au samedi et 15 H le dimanche . A partir du 7 Janvier 2014 à 19 H et le dimanche à 17h 30

  • fritz-prolongations-203x300Isabelle Andréani
  • Xavier Lemaire
  • Décors : Caroline Mexme
  • Costumes : Rick Dijkman
  • Scénographie et lumières : Stéphane Baquet
  • Musique : Régis Delbroucq

 

 

Qui est donc FRITZ HABER? D’emblée le dramaturge Claude COHEN fait descendre de son piédestal le personnage historique de FRITZ HABER en le tutoyant comme s’il entendait appuyer sur sa conscience, comme si avec cet interrupteur que représente la conscience, il souhaitait mettre en lumière, les coulisses particulièrement sombres de la science.

 Comment imaginer que des inventions capitales pour l’humanité, aient pu germer à l’intérieur d’individus sans états d’âme.Tel est montré, le savant Fritz HABER récompensé, nobélisé pour avoir réalisé « la synthèse de l’ammoniac à partir de ses éléments ».Devenu Directeur du service de guerre chimique pendant la 1ère guerre mondiale, il mit au point des armes chimiques, hélas, fort efficaces. Mais son invention est aussi à l’origine des engrais azotés utilisés pour nourrir la planète.

 Non, un homme quel qu’il soit ne peut supporter sur ses épaules les calamités et les bienfaits de ses inventions. Nous n’en avons pas fini avec les découvertes de la science et les savants sont des hommes comme les autres et extrêmement fragiles. Nous rejoignons le mythe de Prométhée qui découvrit le feu et fût condamné à avoir son foie dévoré par un aigle. Un enfant pourrait le dire, c’est l’usage que les hommes font des éléments, l’eau, le feu, la terre et de leur imagination, qui révèle leurs potentiels soit néfastes, soit bienfaisants.

 Claude COHEN exprime à travers le couple que forma Fritz HABER et sa femme Clara IMMERWAHR également chimiste de renom, les affrontements entre deux perceptions de la science, l’une humaniste, l’autre pragmatique.

 Leurs débats mettent en lumière les ressorts psychologiques, les failles de leurs raisonnements. Le combat idéologique devient une scène de ménage particulièrement douloureuse, humiliante. Elle trahit la misère sexuelle du couple, leurs complexes personnels celui de la femme esclave et soumise, celui du petit juif arriviste qui cire les bottes des allemands.

 C’est leur impuissance à s’aimer qui donne l’impression que Fritz HABER s’échappe de sa vie étriquée, en rêvant de gloire à tout prix et que Clara cherche un échappatoire dans la religion et l’amour de son fils.

 D’un point de vue psychanalytique, c’est toute la libido de Fritz HABER qui va se transmuer en énergie créatrice ou destructrice, toutes ses frustrations qui vont être balayées par la sensation de pouvoir.

 Ce voile frissonnant, âpre et intime qui se lève autour de deux héros de la science qui participent à la destinée de l’humanité, est poignant parce que nous savons que ce voile c’est le nôtre, il représente vraiment notre ignorance, et en même temps fait appel à notre conscience simple, mais capable d’éprouver sa vulnérabilité face aux pouvoirs de la science.

 Une science sans conscience ? Telle est la question.  C’est non seulement celle de tout scientifique, c’est celle de tout individu qui cherche à comprendre le monde, qui pourrait se surprendre à penser que FRITZ HABER tout génial savant qu’il était, fût un fou malheureux. Il sacrifia sa femme à l’autel de la gloire, pour ne pas perdre la face,  mais la perdit quand même puisqu’il sera évincé de ses fonctions en tant que juif, sous le règne d’Hitler.

 Cet épisode tragique de l’histoire humaine qui voit l’apparition d’armes chimiques destructrices en dépit des alarmes de Clara IMMERWAHR s’exprime dans la pièce de Claude COHEN à travers un homme et une femme seulement. Leur combat, leurs déchirures sont au cœur de notre intimité.

 Interprétée par des comédiens formidables qui jouent avec leurs tripes, cette pièce saisissante, bouleversante, nous la regardons presque avec les yeux d’HERMANN, le fils qui entend tout derrière les murs.

 Paris, le 28 Décembre 2013                Evelyne Trân

 

 

 

 

 

 

ANTIGONE de Jean Anouilh – Mise en scène de Marc PAQUIEN – A la Comédie Française du 20 Décembre 2013 au 2 Mars 2014

Élèves-comédiens :
Troisième Garde : Laurent Cogez
Le Page : Carine Goron
Deuxième Garde : Lucas Hérault

Antigone incarne la rébellion face au pouvoir, elle est aussi une figure de la jeunesse encore capable de s’émouvoir et de remuer dans les brancards face à l’ordre régnant  et figé incarné par Créon.  Elle ne défend pas d’autre idée que celle du droit d’exister, en accord avec elle-même. Elle parle de liberté dans un monde qu’elle sait muré par le pouvoir.

 Chez ANOUILH, on assiste à la naissance d’Antigone, dont l’acte de rébellion ne sera récupéré politiquement qu’après sa mort. Antigone ne parle que pour elle-même et en ce sens, elle rejoint la conscience solitaire de tout individu face à la pression sociale et politique de tous bords.

 Pour défendre leurs  idéaux, des individus n’ont pas craint d’aller au-devant de la mort. Mais dans sa pièce écrite en 1942, en pleine 2ème guerre mondiale, ANOUILH veut aller au-delà d’un idéalisme qui fabrique des héros hors du commun.

 Son Antigone est une jeune fille en chair et en os qui est traversée par les émotions  de n’importe quelle adolescente. Elle est amoureuse, elle aime la vie, elle rêve de fonder un foyer. Elle sort à peine de l’enfance. D’une certaine façon, son acte de recouvrir le cadavre de son frère constitue pour elle une 2ème naissance. A travers cet acte, elle découvre son rôle, elle peut dire d’elle même « Je suis Antigone ». Mais elle agit d’instinct, elle pense seulement que c’est ce qu’elle a à faire et son acte est pur. Un acte pur associé  à un crime, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Tout le long de la pièce, Antigone, va entendre des interprétations de son acte  à travers tous les autres personnages et elle va le vivre dans sa chair. En une seule journée, elle va vivre toute sa vie.

 Antigone ne parle que de vie et elle vit au présent. Face à elle, Créon n’a pas d’autre fibre de vie que son pouvoir politique. Les rapports de force entre Antigone  et lui sont terribles. Anouilh et le metteur en scène nous montrent qu’ils en viennent aux mains.

 Avant d’être morts, ils étaient vivants tous ces personnages semble nous dire le metteur en scène qui nous les représente  figés comme sur une photo de classe  sur la scène, en préambule  de la pièce.  Qu’ont- il fait de leurs vies, nous demandons nous, de leur capacité de raisonner, de s’émouvoir, d’être, d’aimer ?

 Pouvons-nous nous retourner dans nos tombes d’oubli et d’indifférence ? Si notre perception s’éloigne de l’humain, elle fabrique des monstres tels que Créon. Alors ANOUILH s’attache à laisser bruire de la bouche d’Antigone qui n’est pas un ange, les paroles qui labourent la chair, qui remuent, qui sont souffle de vie.

 Cette humanité transpire à travers la mise en scène volontairement austère de Marc PAQUIEN, laissant  Antigone, incarnée fébrilement par la troublante Françoise GILLARD,  Créon, étonnamment humain dans l’interprétation de Bruno RAFFAELLI, et les autres personnages,  se désincruster progressivement des murs de l’oubli, de la mort,  pour venir seulement témoigner qu’ils ne sont pas morts. La résonance de l‘Antigone d’ANOUILH est actuelle, charnelle, physique et donc morale, elle bouleverse plus que jamais.

 Paris, le 24 Décembre 2013                  Evelyne Trân

 

L’obole du poète

PORTRAIT Adama TRANFaudra-t-il que je vous parle de ma douleur pour que vous me croyiez enfin !

 Mon nom est invisible, je parle du fond de mon terrier et mon moi est chargé de quantités de petites bêtes qui me racontent des histoires.

 Si j’ai un visage, il se déplace, il est regard pour accueillir toutes ces petites choses qui s’étonnent d’être ensemble.

 Tout au fond du trou, je n’ai recueilli qu’un pâle morceau de papier. Il était tout délavé, il mesurait 2 centimètres. C’était ma seule richesse. Un lambeau de papier, voyez-vous, ce quelque chose de frêle et de solide à la fois que j’aime car j’ai horreur du marbre.

 Ce petit morceau de papier est fichu dans ma mémoire. Il s’y ballote. Grâce à lui, je vois la mer, les palmiers, la plage, je vois une voile et son bateau et un bout de ciel de nuage charmant.

 Grâce à ce bout de papier, je peux me transporter en pleine mer. Sur ce bout de papier, je peux voir défiler mille écritures, je peux entendre crépiter la mer, je peux reconnaître les lèvres d’un poète chéri.

 Il n’a jamais flanché ce bout de  papier. Il est devenu pointu au-dessus de la mer, trop léger pour s’y noyer, le voilà refuge de milliers poètes sur les flots. Sur 2 cm, il y a la place pour écrire le mot poète ou simplement sourire.

 Je ne suis pas important dit-il. Je caresse tout le souvenir des gens qui sont morts, je lave leur mémoire pour  la réveiller toute chaude encore sur quelque rocher, sous les pas d’un enfant. Je transporte leurs âmes, je suis insignifiant.

 Celui qui enlèverait de ma mémoire ce fichu papier, ne me ferait pas de mal. S’il le fallait, j’écrirais sur une feuille d’arbre, j’écrirais sur ma main, j’écrirais en l’air. Mais ce n’est pas moi qui écrit, c’est la pluie, le soleil, c’est leur faconde qui s’expriment avec un bout de papier tellement résistant qu’il se déplace. S’il le fallait, j’écrirais sur mon ombre, il parait que c’est possible, alors, alors tout est possible…

 Sur un bout de papier déchiré comme un morceau de pays qui avance, il y a la place pour le sourire d’un homme aimé, pour ses cicatrices et même son regard qui perce à travers, et qui te dit prends le.

 Paris, le 23 Décembre 2013               Evelyne Trân

 

 

LES DEUX BOSSUS ET LA LUNE – Conte théâtral inspiré d’un conte populaire portugais_A partir de 5 ans – Texte et Mise en scène de Richard DEMARCY au GRAND PARQUET – 35, rue d’Aubervilliers 75018 PARIS – du 3 au 22 Décembre 2013

LES DEUX BOSSUS ET LA LUNEArtistes : Alain Aithnard, Nicolas Le Bossé, Antonio Da Silva

 C’est certainement un enfant qui posa le premier cette question à ses parents, un jour en levant le nez vers le ciel «  Mais pourquoi la lune est-elle bossue ? » Les « pourquoi » et les «comment»  des mômes entre 3 et 5 ans sont aussi imposants que ces milliers d’étoiles qui nous narguent dans le ciel, ce dont témoigne Victor Hugo, notamment dans son poème Booz endormi :

et Ruth se demandait,

Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles,

Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été,

Avait, en s’en allant, négligemment jeté

Cette faucille d’or dans le champ des étoiles

 Dans une fable très rafraîchissante tirée d’un conte portugais, Richard DEMARCY nous raconte l’histoire d’amitié entre deux bossus dont les bosses sont sans doute chargées de toute la misère du monde. Victimes des quolibets et méchamment pointés du doigt par les gens du village, ils fraternisent et réussissent à apprivoiser le seul sorcier de la forêt capable de les débarrasser de leurs bosses.

 Les contes ne sont jamais absurdes car ils racontent des faits réels. Pour ma part, je profite de cet espace pour rendre hommage à une dame bossue rencontrée en Guadeloupe, si bien appréciée par les villageois, qu’elle était heureuse et très philosophe. Une fois, cette dame invita à danser une jeune étrangère qui tout émue, accepta ce gage d’humanité sans bornes.

 Il est très probable que Richard DEMARCY ait rencontré des sorciers dans sa vie comme les deux compères de sa fable qui ont du mal à comprendre le langage du grand sorcier et puis qui finissent par le prendre très au sérieux, car il y va de leur métamorphose .

 Pour dire que les métamorphoses ne se passent pas seulement en apparence mais aussi dans la tête. Chacun a sa bosse, visible ou pas comme la lune qui est peut être bien l’ancêtre de nos troubadours dans le ciel, elle ne triche pas, elle qui se transforme  telle une véritable comédienne.

 « Mais on se fout de la lune » ricaneront certains. Car sur terre, il faut bien les trimballer ses vilaines bosses. S’en débarrasser a un prix, le sorcier exige des deux bossus qu’ils aient de l’imagination, enfin qu’ils donnent quelque chose. Mais la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a. Alors les deux bossus misérables vont dire des poèmes, vont danser pour séduire le grand sorcier.

 Comme des enfants, nous en venons regretter que les bossus n’aient plus de bosses. Les voilà devenus tout nus dans le champ du bizarre, mais sous les feuilles d’automne qui jonchent la scène ou la forêt, court un scarabée d’or, bien réel qui attend d’être conté par les deux bossus de la lune, histoire sans fin.

 Dans cette grand forêt très simple, où le tour d’une table devient un char, où un grand sorcier noir, fabuleux, mène la danse et deux clowns bossus refont leur monde, avec quelques recettes, l’amitié, la solidarité, quelques fanfaronnades et une bonne dose d’optimisme,  les spectateurs enfants et adultes, sentent croître leurs ailes.  

 Voilà un joli spectacle, gratifiant, superbement bien interprété et lunaire juste ce qu’il faut pour rêver à ces deux bossus qui transforment leurs bosses en pommes de terre lunaires. Nous le savons, la terre et la lune font bon ménage, c’est tout l’esprit de Richard DEMARCY de nous le rappeler en grand explorateur de contes vivants, réels et fantastiques.

 Le 22 Décembre 2013            Evelyne Trân

NUIT D’ETE LOIN DES ANDES O U…DIALOGUES AVEC MON DENTISTE de et par Susana LASTRETO – Accompagnée au bandonéon par Annabel de Courson du 5 au 22 Décembre 2013 au Théâtre de l’Epée de Bois à la Cartoucherie de Vincennes

SUSANA LASTRETOAuteur : Susana Lastreto
Artistes : Susana Lastreto, Annabel de Courson
Metteur en scène : Susana Lastreto

Nous allons voir  un spectacle de Susana LASTRETO, comme nous prenons un train pour la bonne humeur avec l’assurance que, pendant le parcours, nous aurons beaucoup de surprises. Un véritable petit voyage qui rime avec Argentine, bandonéon, trublion, tout ce que vous voulez puisque Susana LASTRETO a l’art de deviner vos désirs d’inconnu, de fantastique.

Il faut dire qu’elle-même est une aventurière, puisqu’elle est partie très jeune de l’Argentine avec- nous dit-elle- l’espoir d’avoir un destin «EXTRAORDINAIRE ». Elle n’avait en bandoulière qu’un optimisme à toute épreuve, un peu comme Don Quichotte.

 Une chose est sûre c’est qu’elle n’aime pas la ligne droite trop monotone à son gré, qu’elle est donc plutôt adepte du coq à l’âne, bref qu’elle est allergique à LA BAULE et  extrêmement indépendante.

 Susana LASTRETO est donc une femme libre qui sans avoir l’air nous donne une leçon de vie. Elle n’a  peur de rien sauf de la morosité et son regard pétille de gourmandise pour à peu près tout, ce qui lui permet d’apprivoiser les situations les plus inconfortables en les transformant en petites réjouissances.

 Dans son one woman show, elle nous raconte sa vie d’exilée en France comme si elle remuait avec un fouet une belle marmite de souvenirs croustillants dans laquelle chaque convive peut recueillir à coup sûr l’ingrédient qui le fera sourire et pansera ses plaies inimaginables, pourquoi  pas la peur du dentiste, la solitude avec son chat, la sensation d ‘être perdu dans le métro et le choc de se retrouver nez à nez avec un contrôleur flic qui vous demande vos papiers, votre ticket etc…

 Cela n’a l’air de rien, cela peut apparaître banal, trop simple, toutes ces galères  de la vie quotidienne, mais pour Susana LASTRETO, l’exilée, tout prend des proportions rocambolesques, incroyables.

 Elle fait du fantastique en utilisant des bouts de fils comme une bonne sorcière avec un tablier de femme de ménage qui souffle sur la poussière, l’œil toujours rivé sur sa bonne étoile, une imagination vive capable de dévaler du métro, ou de ses sandales d’enfance en Argentine jusqu’au cabinet de son  dentiste que nous n’imaginions pas en petite lampe de bureau mais qui se révèle fabuleux, voire très instructif. .

 « D’où viens-je ? Qui suis-je ? Où vais-je ? » Si elle n’existait pas, il eût fallu l’inventer Susana LASTRETO car elle rivalise de toupet, de fantaisie, de coquetterie, de malice avec Mary Poppins, Alice au pays des merveilles. Sauf qu’elle est beaucoup plus drôle, et que ses tours de magie nous sont tout à fait accessibles.  Elle réussit à transformer en chat de compagnie,  notre bandonéoniste préférée, Annabel de COURSON. C’est extra comme disait Léo Ferré !

 Et avec son petit accent argentin, elle nous entraine « Dieu sait où » ou si,  là-bas dans sa nuit d’été loin des Andes, dans le pays que nous aimons, le théâtre, avec des bouts de chandelle, dans une jolie petite salle tout en bois qui craque sous les regards ahuris des spectateurs, heureux, tout simplement heureux.

 Paris, le 15 Décembre 2013                     Evelyne Trân

 

 


ANDROMAQUE DE RACINE – Mise en scène – Serge Lipszyc – du 12 au 22 Décembre 2013 – au Théâtre de l’Epée de bois – Cartoucherie de Vincennes – Route du Champ de Manoeuvre – 75012 Pari

Andromaque_portrait_w193Scénographie – Sandrine Lambli 

Costumes –AnneRabaron

Lumières – Jean-Louis Martineau

AvecAuteur : Jean Racine
Artistes : Julianne Corre, Valérie Durin, Isabelle Gouzou, Julien Leonelli, Serge Lipszyc, Sylvain Méallet, Nelly Morgenstern, Lionel Muzin
Metteur en scène : Serge Lipszyc
 
 
 
Les passions telles que nous les décrit RACINE sont si peu ordinaires qu’il semble qu’il a plongé sa plume au lieu même où le vainqueur d’une guerre, en l’occurrence celle de Troie, plante son drapeau sur les cadavres encore fumants des vaincus. La dénonciation des horreurs de la guerre par la bouche d’Andromaque devenue prisonnière de Pyrrhus, roi d’Epire peut frapper l’imagination de spectateurs et a une valeur politique. Andromaque a été représentée pour la première fois dans les appartements du Roi Louis  XIV, lui-même instigateur de guerres sanglantes.

 Dans la mise en scène de  Serge LIPSZYC, les personnages pourraient faire penser à des arbres tutélaires parce qu’ils paraissent immobiles  mais sont en réalité si bien irrigués sous terre par leurs racines, que nous croyons que leur verbe provient bien de cette source souterraine. Chacun parle sans communiquer avec l’autre, imbu par une raison d’être, un humus de vie aussi mouvant qu’un arbre, pour peu qu’on assimile la voix au souffle qui le fait croître.

 Cette étrange perspective rend sensible le fait qu’aucun des personnages ne peut s’arracher à sa souche, qu’ils ne peuvent avancer les uns vers les autres, sauf en s’auréolant d’illusions, de mensonges, de rêves impossibles.

 S’il est fait appel à l’imaginaire du spectateur c’est par association avec celui des personnages qui « s’auto-fictionnent » dans la langue de Racine, et deviennent expressifs, par le concours des mots qui atteignent leurs visages, trahissent leurs émotions malgré leur statisme.

 C’est très impressionnant. Certains diront que dans ces conditions, puisque les acteurs ne bougent pas, une simple mise en scène radiophonique eût suffi. Or Serge LIPSZIK donne véritablement à voir cette vraisemblance si éphémère  mais si charnelle, les accords entre les voix et les visages devenus le foyer, la niche, le creux de l’arbre de leur intime proximité.

 C’est à voir, à toucher de l’œil dans les embruns d’émotions aussi violentes et consumables qu’un souffle de vent sur des rochers, des respirations labiles celles d’Oreste devenu fou par amour pour une Hermione impitoyable et pourtant suicidaire.

 La mort que tous les protagonistes ont à l’esprit devient une sorte de socle mouvant dans la mesure où les morts ne sont pas morts et Andromaque  le prouve puisque c’est par fidélité à son époux Hector et à la tragédie qu’elle doit vivre au passé et au présent en tant que captive, qu’elle  refuse l’amour de Pyrrhus.

 Le nœud gordien de l’amour ne peut être tranché sans conduire à la mort, il est vital. Son aspect sexuel n’est pas mis en évidence, mais on peut y lire  en filigrane une guerre des sexes, y entendre  les souffrances physiques comme si la chair et l’esprit ne pouvaient faire bon ménage sauf chez la vertueuse Andromaque.

 Tous issus de l’épopée de la guerre de Troie, fils et filles de héros, Oreste, Pyrrhus, Andromaque et Hermione ne sont vraisemblables que parce qu’ils sont humains. Dans cette tragédie, chacun puise au plus profond de ses racines, ses raisons d’être et d’avenir en allant au bout de lui-même. Et si le destin tranche, il n’éteint pas les feux.

 Tant qu’il y aura des hommes, il y aura donc des dramaturges pour parler de mort et d’amour. C’est ainsi que souligne leur présence affective, le metteur en scène, dans un monde où il faut encore observer la nature pour éprouver celle de l’homme.

 Voilà un spectacle qui se lit presque sur les lèvres. Il n’y a pas d’autres paysages sur scène que ceux créés par les mots eux-mêmes, proférés par des arbres  aux visages humains. Serge LIPSZYC signe une belle capture de Racine, saisissante, servie par des comédiens  inspirés, capables d’émouvoir nos propres terriers où se niche un certain Racine plus présent que jamais.

 Le 14 Décembre 2013                            Evelyne Trân               

FESTEN de Thomas VINTERBERG – Mise en scène de Laura BOLGHERI et Cécile CHARBIT au THEATRE DE VERRE – 17 Rue de la Chapelle 75018 PARIS, les 5,6,7 et 8 Décembre 2013 à 20 H 15.

FESTEN BISSur le thème des lourds secrets familiaux, la loi du silence qui nous renvoient au mythe d’ŒDIPE, les spectateurs tels des témoins passifs mais concernés qu’ils le veuillent ou pas comme les jurés d’un procès, assistent lors d’une fête d’anniversaire  au règlement de comptes d’enfants avec leur père qui a abusé sexuellement de deux membres de la fratrie.

 Les spectateurs se trouvent dans la position de la plupart des invités qui reçoivent de plein choc, la révélation de l’infamie du père lors du discours du fils aîné dont l’attitude distinguée, polie, contraste évidemment avec ses propos.

 Tout le long de cette pièce terrible adaptée du film éponyme de     Thomas VINTERBERG et Mogens RUKOV, tous les participants de la fête, le père y compris, vont progressivement être amenés à affronter l’ignominie perpétrée par celui qui représentait l’ordre, et la respectabilité de la famille, le patriarche. Les crimes du père éclaboussent toute la famille, victimes ou témoins passifs. Il faudra la violence du fils cadet, alcoolique et hystérique pour mettre un terme à cette lâcheté : effacer le crime, ne pas en parler sous le vernis des convenances. Il faudra en quelque sorte tuer le père et continuer la fête sans lui.

 Car la tentation de ne rien dire, la tentation du déni, cela nous renvoie aux crimes de l’humanité,  au silence de ceux qui ont laissé faire. Du coup l’on comprend que le silence est lui aussi criminel. Dans la pièce, il est symbolisé par la morte, la sœur jumelle de Christian, qui s’est suicidée et  dont le souvenir rôde autour des vivants et interpelle leur conscience.

 A maints égards, il s’agit d’une pièce politique dans la mesure où c’est la fonction, la réalité de la famille, le premier corps social, qui obligent chacun de ses membres à prendre position, alors même qu’ils ne se référaient  qu’au chef et avaient abandonné toute initiative, confortés qu’ils étaient par leurs croyances en un père omniscient, intouchable, écrasant.

 C’est cette raison politique qui sous-tend le drame familial, qui devient omniprésente, essentielle au sens même que l’entendait le père. Les spectateurs vivent un suspense psycho-politique, inimaginable car la situation est proprement impossible : comment un père peut-il avouer au petit déjeuner, face aux invités d’une fête d’anniversaire, les crimes odieux qu’il a commis ?

 La dimension psychologique se focalise sur la victime, le frère aîné, la mère complice, la sœur insouciante, le benjamin défoncé, mais la figure du père reste extérieure comme si ce dernier n’avait pas d’âme, qu’il était un monstre impossible à sonder.

 Certains aspects caricaturaux de la pièce sont visibles dans la mise en scène de Laure BOLGHERI et Cécile CHARBIT qui mettent l’accent sur le côté grotesque de la réunion familiale, mais qui manœuvrent leur torche de façon suffisamment habile pour laisser l’œil du spectateur flairer tous les affects qui agitent les personnages en extérieur ou en intérieur, comme dans un tableau soumis à différentes lumières, en perpétuel mouvement, en perpétuelle tension.

 Les jointures  entre les scènes intimistes et les scènes extérieures ne sont pas toujours  évidentes car les intervalles sont parfois soit trop rapides, soit trop lents. Mais dans l’ensemble, le rythme respecte la respiration du spectateur qui n’ a pas le temps de tergiverser et se laisse surprendre.

 Jean Tomas WARD qui joue MICHAËL, le fils cadet, insupportable, dégage une belle énergie. Erik CHANTRY en HELGE, le père, est arrogant sans tomber dans la caricature,  Olivier KUHN est un Christian sensible, très émouvant. Les autres comédiens sont quelque peu desservis par leurs rôles peu fouillés psychologiquement mais certains arrivent à composer avec le grotesque avec brio, notamment Sarah MATHURIN et Fabrice-Emmanuel ROUX.

 

FESTEN BISLe tableau familial en dépit de son cadre, le lourd secret de famille qui va tomber, reste très coloré et vivant. C’est un spectacle festif dans tous les sens du terme qui vaut vraiment le détour. Mis en scène par de jeunes metteures en scène pleines de promesses, il captive de bout en bout le spectateur. Il n’arrache pas les larmes mais interpelle néanmoins notre intimité, voyez-vous, ça parle de famille, de représentations lors de dîners familiaux, ça nous parle, n’importe quel rôle que nous ayons à tenir.

 Paris, le 7 Décembre 2013         Evelyne Trân

 

DEADLINE – Création théâtre danse par la Compagnie La Rumeur à l’Usine Hollander – 1, rue du Docteur Roux 94600 CHOISY-LE-ROI – du 5 Décembre 2013 au 2 Février 2014

DEADLINEConception, mise en scène, chorégraphies Patrice BIGEL  Scénographie, lumières Jean Charles CLAIR – Textes : Alison COSSON, Conception sonore Julie MARTIN

 avec Samih ARBIB, Mara BIJELJAC, Francis BOLELA, Sophie CHAUVET, Anna PERRIN 

Que le temps soit physique, corporel, c’est à peine si nous y songeons. C’est souvent dans des situations de contraintes ou de plaisir que nous sommes à l’écoute de notre corps. Il est possible que dans la société organisée qui est la nôtre, nous ayons domestiqué  notre corps de façon qu’il puisse s’y intégrer en adoptant  ses repères,

 La course contre la montre, c’est sans doute inconsciemment une course contre la mort, toujours cette idée qu’on n’a pas le temps, que si l’on manque un rendez-vous, quelque chose va s’écrouler.

 La course donc toujours la course comme s’il fallait être le plus rapide  pour ramasser quelques miettes d’un gâteau qui assurent notre subsistance. La vitesse avec laquelle nous savons répondre aux situations pourvoyeuses de récompenses que nous croyons indispensables, nous dope d’un sentiment de puissance, de domination, de maitrise. Plus vite pour damer le pion à la mort, pour gagner, gagner …

 La terre s’arrêterait-elle de tourner si nous jetions notre montre à la poubelle. Sûrement pas, mais c’est nous-mêmes qui n’existerions plus pour les autres.

 DEADLINE TERQuelles sont donc les injonctions du corps inconscient, quand aujourd’hui, il n’est question que de gestion, d’économie ? Nous croyons que si nous pouvons tout obtenir plus vite,  nous avons gagné du temps mais quel temps ?  Est-ce vraiment le nôtre, est ce celui qui satisfait notre mémoire, notre ressenti. Est-ce avec ce temps-là qui se confond avec l’argent, que nous regardons les arbres, que nous levons les yeux vers le ciel, que nous écoutons un enfant pleurer.

 Reconnaissons que ces considérations d’ordre philosophique pèchent pas leur banalité. Pourtant il faut  bien témoigner d’un sentiment de malaise propre à notre civilisation moderne. S’il ne s’agit pas  de nier le progrès en s’offusquant d’avoir recours à des béquilles – par exemple des écouteurs dans les oreilles, pour s’apporter quelque bien être dans un métro bondé – on peut penser que notre corps a perdu quelque liberté, il n’est plus pensable, il doit la plupart du temps se taire à cause de conditions de travail qui ont tendance à assimiler l’humain à une machine,  à du bétail.

 Une réflexion sur l’humain s’impose et s’imposera toujours. Un jour, le mythe commercial de la vitesse  sera considéré comme ringard. On parlera de qualité de vie, on parlera de la nécessité de prendre son temps pour aller explorer d’autres ressources humaines qui ne sont pas seulement l’apanage des artistes, des rêveurs.

 C’est le spectacle de Patrick BIGEL qui m’inspire ce préliminaire un peu long. Sans doute parce que DEADINE résonne un peu comme une  épopée bouleversante  de l’individu égaré ainsi qu’une brindille dans l’univers, de son temps corporel en prise avec les sommations e la société mais aussi de l’inconnu qui vrille ses désirs.

 Que dit le corps livré à lui-même ? Il est domestiqué, certes, il a ses réflexes, il est reconnaissable, visible. Mais parfois, il s’écarte des sentiers battus pour simplement se découvrir, se parler à lui-même, et il joue, il joue avec le temps.

 DEADLINE 4Alors on s’aperçoit que le  temps peut devenir espace, sujet aussi d’émerveillement comme un ballon que des gens se lancent. Il est mobile de la même façon que les jambes, les bras, la tête se bougent, se frottent, s’éloignent. Le temps devient un partenaire parce que c’est le corps qui se l’approprie à travers tous ses membres, ses sens immédiats. Il ne s’agit plus de temps abstrait mais de temps physique, d’un temps vital, humain exprimé par le corps lui-même,  ses innocuités, ses réflexes et ses rêves car croyons le, le corps rêve. Mais nous avons tant l’habitude de séparer le corps  de l’esprit !

 Les figures de l’inconscient ne prennent pas la parole, elles épaulent soit le silence, soit la musique qui se côtoient. Alors la scène où un personnage laisse ses bras s’agiter de façon presque mécanique devant un phonogramme qui laisse échapper un chant des années 1900, «Les pêcheurs de perles » a quelque chose de fabuleux, de renversant et d’intime.

 Parce que l’intime se trouve aussi là-bas et ailleurs, et que nous en sommes toujours à nous demander qui sommes nous, nous qui pouvons contempler des falaises millénaires et écouter des chants d’une autre époque ?

DEADLINE 5 Les chorégraphies des danseurs et danseuses, sont simples, elles sont commandées par leur condition physique, elles rappellent des scènes de la vie quotidienne, en ville, dans les transports, leur frénésie, leur folie. Simples et fortes, chevillées au corps. Elles parlent aussi  du plaisir de marcher, de courir et même de se regarder le nombril, les jambes en l’air.

 Et on entend aussi prendre le train, les pensées des personnages dans de jolis textes d’Alison COSSON dont les va et vient et les petites culbutes émotionnelles font écho à de précédentes randonnées gestuelles.

 Mais un tel spectacle ne se raconte pas, il faut le voir donc se déplacer, oui bouger ! Eminemment poétique et tendre,  lumineux, il met en valeur la simplicité, la vérité d’aspirations si humaines qu’on les oublie : respirer, sentir, en laissant s’écouler en soi le vertige. Il y va pour chacun de cueillir ses propres pensées à travers le temps et l’espace comme le Petit Prince de Saint Exupéry.

 Un grand chapeau à toute l’équipe de ce spectacle  où la symbiose entre toutes les cordes artistiques – musique, scénographie, lumières, le texte, chorégraphie – est indéniablement le résultat d’un travail collectif dynamique, effrontément juvénile, n’en déplaise à notre vieille terre !

Paris, le 6 Décembre 2013                       Evelyne Trân

Les (Dés)héritiers de Brasnilav NUSIC – Mise en scène de Ned GRUJIC du 12 Novembre au 22 Décembre 2013 au Théâtre 13 – 103 A Av. Auguste Blanqui 75013 PARIS

Desheritiers_webAvec Annick Cisaruk, Antonia Malinova, Caroline Pascal, Charlotte Rondelez, Rosalie Symon, Jean Hache, Pascal Ivancic, Philippe Ivancic, Sacha Petronijevic, Stéphane Russel et Jean Tom.

Coproduction Compagnie Depuis-Depuis, Les Tréteaux de la Pleine Lune et le Théâtre de l’Etincelle. Avec le soutien de l’Espace Carpeaux de Courbevoie.

Faut-il en rire, faut-il en pleurer, il y a des morts qui ne résistent pas à jouer un dernier tour aux vivants à la faveur du fameux testament censé léguer à leurs héritiers, les biens déjà convoités de leur vivant.

 De nombreux auteurs se sont penchés sur cet événement que constitue l’ouverture d’un testament de sorte que ce n’est pas tant l’intrigue de la pièce qui  suscite l’intérêt mais plutôt la plume  du  dramaturge serbe BRASNILAV NUSIC, dont la pièce « LES (DES)HERITIERS » est mise en scène, pour la première fois en français par de Ned GRUJIK d’origine serbe, entouré pour l’occasion de comédiens d’origines diverses : slovène, serbe, croate, bulgare, polonaise, ukrainienne et bien sûr française.

 BRASNILAV NUSIC peut faire penser à FEYDEAU ou LABICHE mais également à Alphonse DAUDET car ce qui frappe c’est qu’en dépit de leurs instincts grégaires et peu reluisants, les personnages témoignent d’une vitalité de bon augure qui fait sourire.

 Il ne s’agit que de gens ordinaires, en somme, qui pour défendre leurs intérêts, leur ventre,  peuvent d’un coup de baguette se transformer en escrocs, en voleurs, en canailles et cela pour la bonne cause, leurs droits divins à la propriété. Nous ne sommes pas si loin du « Touche pas au grisbi, salope ! ».

 Nous assistons donc à une sorte de combats de coqs et de poules où les plumes hautes en couleurs volent en éclats, un poulailler où voudrait régner en maître, le rusé renard, sous-préfet  Agaton Arsic, interprété par l’excellent Jean HACHE, acoquiné d’une épouse fort précieuse, étonnante Annick CISARUK.

 Galvanisée par le comique des situations et les dialogues très chausse-trappes de Brasnilav NUSIC, toute l’équipe des comédiens glisse avec aisance sur la palette des personnages qui s’éclaboussent les uns les autres de piques bien trempées. Sont particulièrement jouissifs, les échanges entre Sarka, la veuve, interprétée par Antonia MALINOVA très craquante, et le sous-préfet Jean HACHE dont le rôle est de noyer le poisson le plus possible.

 La pièce « LES (DES)HERITIERS » ouvre un pan du rideau sur l’œuvre du grand dramaturge serbe Brasnilav NUSIC dont la plume très décontractée peut rivaliser avec celles de notre répertoire classique. Et c’est tout le mérite du metteur en scène, de son équipe et du groupe musical  « Les yeux noirs » de nous convier à cette découverte. Un bon point supplémentaire, les jeunes semblent apprécier ce genre de théâtre, et ils étaient nombreux, hier soir, à applaudir. L’impression de s’être divertis sans avoir cédé à la crétinisation, cela fait un bien fou !

 Paris, le 4 Décembre 2013              Evelyne Trân