« LA ROSE ET LA BLEUE » de Jacqueline LANG . Une jeune femme sous l’occupation – 1942-1945 – Préface de Serge Klarsfeld – Edition Logomotif –

INTERVIEW JACQUELINE LANG ET EXTRAIT LIVRE Radio Libertaire du 30 JUIN 2012 Deux sous de scène (Pour écouter, il suffit de cliquer)

 « Allô, le Commissariat aux affaires juives, vous êtes bien Madame Lang ? » C’est par ce coup de téléphone que Jacqueline est appelée à apporter couvertures et victuailles à son mari et son beau-père qui viennent d’être arrêtés.

 Quelle sollicitude de la part du Commissariat aux affaires juives. Grosso modo, les juifs étaient considérés comme du bétail qu’il fallait manipuler avec force duperie pour l’amener à l’abattoir.

 Nous n’entendons pas une once de haine contre le genre humain dans le récit de Jacqueline Lang sur ces années de guerre qui ont retranché de son corps terrestre, son mari et ses parents.

 Jacqueline LANG ne se pose pas en victime, le mot lutte affleure sur ses lèvres sauf qu’elle n’a pas envie de parler pour ne rien dire. Les faits parlent d’eux-mêmes.  Elle éprouve  pleinement qu’elle fait partie du genre humain et que sa force à elle, c’est son amour de la vie.

 Jacqueline a entrepris son récit à l’âge de 88 ans. Auparavant elle avait gardé le silence pour ne pas laisser prise aux regrets, à la douleur.  C’est comme ça qu’elle a tenu bon pour élever ses filles, la Rose et la Bleue.

 Son témoignage est poignant. Il a la fraicheur d’une eau vive très profonde, une eau qui a été prise dans un tourbillon et qui raconte simplement son parcours. A travers cette voix, nous pouvons nous regarder et même nous débarbouiller.

 En témoignant d’un malheur qui l’a frappée en tant qu’épouse d’un juif, elle n’obéit qu’à l’amour des siens qu’elle n’a pas voulu quitter avant d’offrir son témoin en gage d’espoir.

 Nous faisons partie des siens.

 Paris, le 28 Juillet 2012                 Evelyne Trân

INTERVIEW JACQUELINE LANG ET EXTRAIT LIVREA écouter extrait interview Jacqueline LANG Radio Libertaire 30/06/2012 Deux sous de scène

N.B : Il est possible de se procurer ce livre à la Librairie du Temple – 53, rue des Rosiers à PARIS Contact@librairiedutemple.fr ou en s’adressant à Claudine.rams@sfr.fr

 

 

 

  

ARBORESCENCES, exposition du peintre IKIOU et du sculpteur Julien SIGNOLET du 18 au 28 Septembre 2012 au Centre Culturel des Finances de BERCY- 143, rue de Bercy 75012 PARIS –

 L’arbre voyageur avec flûte Michel SEULS  L’arbre voyageur

 Toi, tu es un filtre de passage. Comment balancerais-tu ton cœur vers la mer, au-dessus de la dune d’un peintre matelot.

 L’arbre voyageur marqué par l’écume et le sel soudain sort du tableau. Il singe l’homme, il s’habille de feuilles, il a grandi en rêve sous la coque d’un navire. Il a dit : je remuerai le visage d’une foule comme l’on pose pied à terre après un siècle de solitude. Il dit : je suis le voyage d’un seul être à travers mille visages.

 Mais qu’appelles-tu visage oh arbre voyageur ?

  – Je l’appelle expression d’un paysage lointain, sous la frontière d’un œil, d’un menton que sais-je !  Par le secours humain  qui m’appelle revenant  au pays natal, chacun de leurs pays. Et j’y vois aussi bien le vol d’une nuée d’hirondelles que le retour à la nage d’un  être renaissant.

 Tu ne verras pas de bateau échoué au pied de chaque voyageur dans une rame de métro et pourtant je suis celui que l’on nomme l’arbre voyageur d’avoir comme ultime prouesse, promis d’entrer chez chacun d’eux.

 Moi, jaloux de leurs mains, de leurs yeux, leurs épaules, les écoute palpiter   comme mes anciennes feuilles, celles qui m’ont décoiffé, celles que je devine encore. J’entends ceux qui disent « Je voudrais être un arbre » et je m’entends crier « Je voudrais être un homme » Comme c’est bizarre.

 Un peintre et un sculpteur m’ont dévoilé la face.

 Depuis, je scrute l’horizon, à genoux sous leurs branches.

  Paris, le 27 Juillet 2012                           Evelyne Trân

 

LA COMPAGNIE PEEPING TOM au festival de Théâtre Européen de TURIN – TEATRO A CORTE – avec le spectacle A LOUER ( FOR RENT)

Quel autre lieu que celui d’un théâtre, pour faire tourner à l’infini, sous l’espiègle durée des argonautes du spectacle, le déroutant manège de ceux qui l’investissent pour un instant, pour une éternité.

 Ce théâtre ne cesse de pencher comme un bateau  qui mimerait son prochain naufrage depuis qu’à travers un hublot, ses occupants ont lu ou cru voir la pancarte « A louer ».

 Dès lors, leur histoire figée ou écrite sur chacun des meubles ou chacun des membres de l’équipage est prise de convulsions.

 C’est le phénomène du trou noir, distorsion de l’espace-temps, décrit par Schwarzschild qui inspire les créateurs de la Compagnie Peeping tom, Gabriela Carrizo et Franck Chartier.

 L’histoire de la diva déchue rappelle cet extraordinaire film de FELLINI « Et la neva va » (Et vogue le navire ») où tous les amis d’une cantatrice, partent en croisière sur le navire qui transporte ses cendres.

 Le temps compressé par un seul but, une seule destination devient l’écueil auquel se  heurtent tous les individus qui deviennent  les sujets de la symphonie d’un navire seul et perdu quelque part dans la mer.

 Dans le spectacle de la Compagnie Peeping Tom, l’on voit des individus à quatre pattes envahir le salon de ce théâtre déjanté, comme des rats. Tous les personnages sont parasités par leurs pensées qui font irruption à tout moment, n’importe comment. 

 Les deux danseurs coréens, expriment avec une virtuosité extraordinaire, le chamboulement intérieur de domestiques épileptiques.

 Certains individus comme la diva et sa famille constituent un  incroyable appel d’air dans un salon où plane un sentiment de déshérence.

 Tous les effets de disparition-apparition concourent à créer une atmosphère étrange dans un champ de perception où le fantasme  devient réalité. Parce qu’il semble que les personnages finissent par douter d’eux-mêmes : « Est-ce bien de moi dont vous parlez ? Mais qu’étais je donc en train de vous dire ? Qu’est ce qui se passe ? »

 Troubles de la perception, dérangement mental, ou tout simplement cauchemars et rêves alimentés par les multiples interférences qui encombrent le psychisme des personnages.

 D’entrée de jeu, les spectateurs prennent plaisir à escalader leurs obsessions imbues ou oniriques. Leurs propres refoulements prennent corps sous les effets magiques de la danse, du chant et du théâtre.

 Un spectacle étrange et fascinant où tout est à prendre sinon à louer.

 Paris, le 17 Juillet 2012                                 Evelyne Trân

 

Conception & mise en scène: Gabriela Carrizo, Franck Chartier
Dance & création: Jos Baker, Eurudike De Beul, Leo De Beul, Marie Gyselbrecht, Hun-Mok Jung, SeolJin Kim, Simon Versnel
Assistante à la mise en scène: Diane Fourdrignier
Costumes: Diane Fourdrignier et HyoJung Jang
Lumière: Ralf Nonn
Composition sonore: Raphaëlle Latini, Juan Carlos Tolosa, Eurudike De Beul & Yannick Willox
Costruction décor: Atelier KVS
Directeur technique: Pierre Willems
Techniciens: Marjolein Demey, Joëlle Reyns, Hjorvar Rognvaldsson, Filip Timmerman, Wout Rous & Amber Vandenhoeck
Conception décor: Peeping Tom, Frederik Liekens & Amber Vandenhoeck
Production: Peeping Tom et KVS
Coproduction: Théâtre de l’Archipel Perpignan, El Canal Centre d’Arts Enscèniques Salt/Girona, Cankarjev Dom Ljubljana, La Filature Mulhouse, Le Rive Gauche Saint- Etienne-du-Rouvray, Guimarães European Cultural Capital 2012, Hellerau European Center for the Arts Dresden, Festival International Madrid en Danza 2012, Festival de Marseille 2012.
Diffusion: Frans Brood Productions

 

LE CARROUSEL DES MOUTONS de la Compagnie D’IRQUE ET FIEN à la Cour d’honneur du château de VENARIA REALE les 14 et 15 Juillet 2012

Création : Dirk Van Boxelaere – Fien Van Herwegen. Aide indispensable : Leandre Ribera. Musique : Alain Reubens. Technique : Fifi Timmerman, Joris Verponten, Wim Van Goethem. Illustrations : Jan Bosschaert. Machinerie : De Beule Technics. Costume : Monique Jacobs, Roos Pillards.

  Dirk Van Boxelaere est un artiste de rue, acrobate, mime, comédien  qui a fait ses classes notamment à l’Ecole de cirque internationale de MONTREAL. Il crée d’authentiques spectacles de rue, c’est-à-dire des spectacles qui peuvent aussi bien avoir pour cadre une cour de récréation, une place de village, un coin de rue, qu’une cour d’honneur dans un grand château.

 Un jour, suite à des vacances forcées- il se casse la clavicule – il prend des cours de piano avec la pianiste anversoise Fien Van Herwegen.

 Subjugué par la virtuosité de Fien, il rêve aussitôt de partir avec elle et son piano sur la route avec un nouveau spectacle.

 Dirk joue le rôle de l’homme gauche qui ne connait pas grand-chose à la musique. Le piano pour lui n’est qu’un objet de plus à utiliser  pour ses acrobaties et ses galipettes. Il use de tous les artifices pour attirer l’attention de la charmante Fied. Devenu objet d’échange, pour le meilleur, grâce au jeu délicat de Fied et pour le pire, les galipettes de Dirk, le piano finit pas s’envoler avec les 2 co-équipiers.

 Il s’envole pour de vrai. Et tant pis si notre esprit chagrin rétorque qu’il ne s’agit en somme que d’un objet de manège arrimé à une machinerie.

 Nous assistons à la conversion d’un homme du cirque à la musique incarnée par Fien et son piano. Une métamorphose vertigineuse qu’il exprime en sautant, en glissant sur le piano qui se transforme à son tour en couchette, en armoire, en toboggan, en grue A ce point stimulé, quel objet ne s’envolerait pas ? C’est alors que Dirk brandit un ciel de lit, et fait réapparaitre le piano tel un magicien secoue son mouchoir pour libérer une colombe.

 C’est l’histoire d’un homme qui apprivoise un piano, d’une pianiste qui apprivoise un saltimbanque et ainsi de suite. Ils s’élèvent tous les trois dans les nuages, ces fameux moutons, devant les yeux ébahis des spectateurs assis en tailleur ou debout. Beaucoup n’en croient pas leurs yeux comme si s’était animé devant eux un tableau de Chagall, comme si ces personnages étaient arrivés sur un tapis volant.

 Eh bien non, c’est un piano volant, qui rêve vivant. C’est extraordinaire. Un spectacle à ne pas manquer qui fait l’objet d’une tournée européenne. (dirk@dirque.comwww.dirque.com)  

 Les prochaines représentations en  France auront lieu :

Les 10 et 11 Août à THONON LES BAINS (74)

12 Août 201 à CHEVERNY(41)

15 et 16  Septembre 2012 à CERGY PONTOISE (95)

 Paris, le 20 Juillet 2012               Evelyne Trân

 

 

 

 

LES ROIS MAGES DU THEATRE A LA COUR – I RE MAGI DEL TEATRO A CORTE – Festival de Théâtre Européen en scène dans les demeures de la famille de Savoie

Diretto da BEPPE NAVELLO

Fondazione Teatro Piemonte Europa

Il s’agit d’artistes venus d’ailleurs, des quatre coins de l’Europe, avec leurs bagages, leurs roulottes,  répondre à l’appel  du Directeur de Teatro a Corte,  M Beppe NAVELLO  qui depuis la création du festival en 2007, leur ouvre les portes des imposantes Résidences royales de la famille Savoie, nichées au cœur du Piémont.

 Déclarés « Patrimoine de l’humanité »  ces châteaux, nappés  de prestige et surtout de passé (ils ont pour la plupart éclos entre les 17 et 18 ème siècles)  ne risquent pas leur peau en se laissant visiter par le public. Ils semblent en demander toujours plus. Ils ont conquis les rois, il leur faut conquérir les touristes. Sensible à leurs prétentions, pour les rendre plus aimables, plus vivants, M Beppu NAVELLO a imaginé de les confronter  à des artistes contemporains  qui jouent le rôle d’intermédiaires entre le passé et le présent.

 En un mot, ils viennent du futur. Tout se passe comme si M Beppe NAVELLO avait au poignet une sorte de montre géante dont il manipulerait avec délicatesse le mécanisme, aimanté par des artistes de choix.

 Est-ce à dire qu’une certaine science en horlogerie créative est nécessaire pour escalader toutes les figures artistiques : théâtre, danse, cirque, art de la rue, mime.

 Les spectacles proposés par leTeatro a Corte sont destinés à un large public. Certains  ont déjà acquis une réputation internationale. D’autres font leur baptême à ce festival. Mais ils ont tous un point commun, c’est que les artistes qui les composent, sont si engagés dans leur recherche artistique qu’ils n’attendent aucune flatterie ni indulgence de la part du public.

 Les voies de la création aussi mystérieuses soient –elles ne sont pas impénétrables, elles dépendent des personnes qui les parcourent, munies de semelles de cultures très variées.

 Au cours d’une semaine au Festival de Teatro a Corte, « capturés et choisis » par M Beppe NAVELLO, nous avons eu le privilège  de découvrir les spectacles suivants :

  FUGUES de Yoann BOURGEOIS (France)

 Avec l’apparition de Yoann Bourgeois  comme un point sur un i dominant le superbe jardin du château de VENARIA REALE, nous avons pu assister à l’envol de fugues de BACH, interprétées de façon inouïe par ce danseur qui manie les balles et le trampoline, de concert avec les nuages.

 Faut-il qu’il sache convoquer les éléments pour nous donner la sensation d’être projeté par la seule volonté d’unir son corps à la matière.

 La « prouesse poétique de l’abandon » invoquée par l’artiste devient un poème instantané pour les spectateurs, un haïku visuel, étourdissant, vivant.

 Comment reproduire le mouvement d’une fugue qui traverse la mémoire. En dansant peut-être, en opérant une cisaille dans l’espace-temps, en se laissant submerger par l’émotion. « Fugues » fait incontestablement partie des meilleures surprises de ce festival.

  MONGER de Barak MARSCHALL (ISRAEL)

Il fallait inaugurer l’ouverture au public du Château de RACCONIGI par la présentation d’un spectacle d’ampleur internationale.

 Chorégraphe Israélien, Barak MARSCHALL entend avec MONGER poser le  la de ses propres racines culturelles  tout en manifestant l’apport des expériences artistiques contemporaines qui alimentent  son inspiration.

 A partir du thème des « Bonnes de Jean Genêt notamment, les rapports de force entres patrons et domestiques, la scène est investie par différents tableaux sur lesquels tels des motifs récurrents des danseurs associés à des marionnettes, dansent, se bousculent et miment les allers et retours d’une réalité trébuchante, voire paralysante.

 L’ensemble du spectacle a la fraicheur d’une mosaïque, qui ferait valser ses motifs sous l’effluve de la musique Yiddish. Un patchwork en quelque sorte des tribulations artistiques de Barak Marschall qui a ouvert la danse lors de l’ouverture du Château de RACCONIGI.

 LOL par la PROTEIN DANCE COMPANY (Grande Bretagne/Italie) :

 Ils surfent sur leur ordinateur comme ils feraient du patin à glace ou de l’auto tamponneuse, ils se bombardent de mails qui annoncent leur arrivée en couinant. Ils ne sont pas de la vieille école, ils sont jeunes et ils trouvent ça tellement « cool » de pouvoir s’envoyer en l’air simplement en pianotant sur leur clavier.

 S’envoyer en l’air, une façon de parler parce que les 6 jeunes danseurs survoltés qui possèdent l’art du babillage sur le web se retrouvent fort dépourvus dès lors qu’ils doivent composer avec la réalité. Leurs déconvenues donnent lieu à des professions de foi hilarantes qui rappellent fort heureusement Chaplin ou Buster Keaton en décalage renversant. Ceci pour rassurer les générations de 2ème type car l’intempestive jeunesse n’ a pas besoin de références pour mettre les pieds dans le plat, elle déborde  d’énergie communicative.

 Ils n’en finissent pas de se frotter les yeux aux pigments des images virtuelles, quand leur cœur rebondissant n’a au fond qu’une idée en tête, histoire de se reproduire, la quête de l’âme sœur.

  Ah sœur Anne, sœur Anne, je te trouverai à la barbe de tes aïeux, dussé- je quitter mon ordi .

 Un spectacle réjouissant imaginé et réalisé par Luca Luvestrini et physiquement servi par des prodigieux danseurs.

 A LOUER par la Compagnie PEEPING TOM (Belgique)

 Quel autre lieu que celui d’un théâtre, pour faire tourner à l’infini, sous l’espiègle durée des argonautes du spectacle, le déroutant manège de ceux qui l’investissent pour un instant, pour une éternité.

 Ce théâtre ne cesse de pencher comme un bateau  qui mimerait son prochain naufrage depuis qu’à travers un hublot, ses occupants ont lu ou cru voir la pancarte « A louer ».

 Dès lors, leur histoire figée ou écrite sur chacun des meubles ou chacun des membres de l’équipage est prise de convulsions.

 C’est le phénomène du trou noir, distorsion de l’espace-temps, décrit par Schwarzschild qui inspire les créateurs de la Compagnie Peeping tom, Gabriela Carrizo et Franck Chartier.

 L’histoire de la diva déchue rappelle cet extraordinaire film de FELLINI « Et la neva va » (Et vogue le navire ») où tous les amis d’une cantatrice, partent en croisière sur le navire qui transporte ses cendres.

 Le temps compressé par un seul but, une seule destination devient l’écueil auquel se  heurtent tous les individus qui deviennent  les sujets de la symphonie d’un navire seul et perdu quelque part dans la mer.

 Dans le spectacle de la Compagnie Peeping Tom, l’on voit des individus à quatre pattes envahir le salon de ce théâtre déjanté, comme des rats. Tous les personnages sont parasités par leurs pensées qui font irruption à tout moment, n’importe comment. 

 Les deux danseurs coréens, expriment avec une virtuosité extraordinaire, le chamboulement intérieur de domestiques épileptiques.

 Certains individus comme la diva et sa famille constituent un  incroyable appel d’air dans un salon où plane un sentiment de déshérence.

 Tous les effets de disparition-apparition concourent à créer une atmosphère étrange dans un champ de perception où le fantasme  devient réalité. Parce qu’il semble que les personnages finissent par douter d’eux-mêmes : « Est-ce bien de moi dont vous parlez ? Mais qu’étais je donc en train de vous dire ? Qu’est ce qui se passe ? »

 Troubles de la perception, dérangement mental, ou tout simplement cauchemars et rêves alimentés par les multiples interférences qui encombrent le psychisme des personnages.

 D’entrée de jeu, les spectateurs prennent plaisir à escalader leurs obsessions imbues ou oniriques. Leurs propres refoulements prennent corps sous les effets magiques de la danse, du chant et du théâtre.

 Un spectacle étrange et fascinant où tout est à prendre sinon à louer.

 Paris, le 17 Juillet 2012        Evelyne Trân

 

 

ZIO VANJA (ONCLE VANIA) de TCHEKOV Création pour le Festival TEATRO A CORTE – DRUENTO : Centro internazionale del Calvalllo

Quelques journalistes français viennent de vivre une expérience étonnante : assister à une représentation de l’ONCLE VANIA en italien,  mise en scène par le jeune metteur en scène Emiliano BRONZINO.

Connaisseurs de l’œuvre de Tchekhov mais peu familiarisés avec la langue de Dante, ils ont eu la sensation d’avoir été pris en quelque sorte en otage par les personnages, comme dans une pièce de Pirandello.

 Le public est accueilli sous la tonnelle du jardin où vont et viennent, en plein émoi, les membres d’une famille déchirée qui déballent leur mal être, leurs affaires de cœur, leur vie en somme.  Les spectateurs ont la sensation d’être témoins malgré eux  d’un drame qui aurait pu se produire aussi bien, hier, sous cette tonnelle.

 Cette proximité voulue avec le public rentre dans les exigences du metteur en scène et est sans doute une des clés de l’incroyable présence des personnages de Tchekhov qui s‘expriment avec une telle véhémence qu’à défaut de connaitre leur langue, les spectateurs peuvent lire sur leurs visages, leurs gestes, et les intonations de leurs voix.

 Nous savons que l’onde de choc c’est l’arrivée de la belle Elena dont la beauté réveille les désirs d’individus confinés dans la résignation, les habitudes. L’amour, sa tentation agit comme une boite de pandore. Tous les personnages croient pouvoir attendre de l’amour, leur prochaine libération, mais retournent les uns après les autres dans leur prison. Au moins auront-ils tenté l’aventure à bout portant.

 Dans cette pièce tragi-comique Tchekhov peint de façon ironique des individus qui recherchent en vain un sens à leur  existence. La plupart des personnages invoquent leurs rêves, leurs idéaux mais paraissent toujours repoussés dans leurs élans. Les pieds sur terre et le cœur dans les nuages, ils se cassent la gueule contre des murs .Mais, voilà Tchekhov leur donne la parole et c’est  un bonheur de les voir s’animer aussi vivaces que des chimères.  La palette des sentiments sous le nuancier de Tchekhov est si riche et si bien rendue par les comédiens ! Un simple détour sur le visage d’Eléna, illuminé par la passion, peut donner l’impression d’avoir franchi une source.

 Tchekhov en italien, en russe, en français … C’est tout de même formidable de penser que ses personnages n’ont pas de frontière.

Ce n’est donc pas un hasard si nous avons pu découvrir cette remarquable création d’ampleur internationale, dans le cadre du Festival TEATRO A CORTE sous  l’égide de la Fondation du Théâtre Piémontais Européen . Bravissimo  !

Paris, le 14 Juillet 2012               Evelyne Trân

 

FRAMESHIFT, création de RENATA SHEPPARD au Théâtre ASTRA de TURIN, le 12 Juillet 2012

Una produzione VIRTUAL REALITY & MULTI MEDIA PARK

Realizzata con il supporto di / With the support ofCamera di Commercio, Industria, Artigianato e Agricoltura di Torino / Chin-Lin Foundation for Arts and Culture, Taiwan / EDISU Piemonte / United States Embassy

In collaborazione con / Collaboration with Progetto 3Script – Polo di Innovazione sulla Multimedialità e la Creatività Digitale – Regione Piemonte

Con il patrocinio di / With the patronage ofRegione Piemonte – Assessorati al Lavoro e agli Affari Istituzionali – US-ITALY Fulbright Commission

Dans le cadre du festival international TEATRO A CORTE de Turin, toujours éclectique, lieu de rencontre incontournable pour tous les artistes désireux d’engager un dialogue stimulant  avec le public, RENATA SHEPPARD vient de présenter en première mondiale au Théâtre ASTRA, un spectacle de danse onirique ayant pour thème la condition humaine à l’ère robotique.

 Sans aucun doute, la formation interdisciplinaire de RENATA SHEPPARD à la fois chorégraphe et vidéaste, accentue le profil de cette artiste  en quête d’archétypes,  censés relativiser l’impact de la technologie surpuissante sur l’humain .

 L’homme dépassé par ses propres créations ! Le sujet n’est pas nouveau. Aujourd’hui ce qui pourrait faire figure de « monstre » ce n’est pas Frankenstein, c’est l’ordinateur. Parce que l’homme a délégué une partie de son cerveau à la machine, le voilà en train de se repenser à l’état de nature.

 Nous voyons, tout d’abord, sur scène des mouvements, des flottements de végétaux à têtes d’homme et de femmes qui rampent, se cramponnent, dressent leurs bras, leurs torses et leurs jambes à la manière d’insectes, d’araignées volantes.  Au- dessus d’eux, trois écrans « solaires » mitraillent l’atmosphère de messages incompréhensibles.

 Que veut dire le robot dont l’apparence rappelle à ravir celle d’un dinosaure ou d’un dragon ? Et le téléphone, déjà ancestral, pourquoi a-t-il l’air de sonner dans le vide ?

 L’apparition d’une petite fille sur  scène si fraiche, si mignonne, représente évidemment la source de RENATA SHEPPARD qui a choisi d’exprimer ses éblouissements, ses doutes, sous la forme d’un conte, à travers le regard d’un enfant.

 Le spectacle, tel un poème, dont les stances épouseraient les croisements des membres  des danseurs, invite à une sorte de méditation végétale, presque enfantine mais surtout très sensitive.  

 Les danseurs deviennent pour les spectateurs aussi curieux que des insectes-fleurs dont les cris seraient perceptibles au toucher.

De sorte que le spectateur peut fort bien découdre de l’antagonisme  homme/machine, et se laisser emporter par ses propres rêveries.

 Parce que RENATA SHEPPARD laisse la porte ouverte à ce zeste d’innocence, elle entend émouvoir le spectateur au-delà du visuel, armée d’un sixième sens à venir.

 Sur ce chemin,  il s’agit au-delà de la simplicité du propos, d’une forme engagée de création, pudique et profonde.

 Le 13 Juillet 2012                      Evelyne Trân

 

HOLY MOTORS DE LEOS CARAX .Point de vue d’une spectatrice

Comment parler d’HOLY MOTORS, quand on n’est pas cinéphile, professionnel du cinéma. Tant pis, je me jette à l’eau. Je suis juste une spectatrice qui rentre dans un cinéma comme elle irait pécher quelques images au bord de l’eau. Qu’est-ce qu’on va chercher au cinéma ? Je l’ignore. Je me souviens d’une jeune femme à qui je racontai brièvement le scénario d’un film, me confier qu’elle n’avait pas besoin d’aller au cinéma parce qu’elle avait déjà vécu le sujet du film. J’avais bien aimé sa réflexion parce que cela me confirme dans l’idée que la réalité dépasse la fiction, et qu’on n’entre pas dans un film comme l’on va à la boulangerie chercher du pain et pourtant…

 Clic, clac, nous sommes tout un chacun, nos propres reporters. Si nous nous couchions sur la vitrine d’une boulangerie, imaginez tous les films que nous pourrions voir s’y  projeter. C’est extraordinaire. De là à penser qu’un écran de cinéma puisse configurer une vitrine qui nous absorberait un instant, tout en continuant à vivre sa vie de vitrine… Le piéton finit pas dépasser la vitrine tandis que la vitrine, elle continue à palpiter à l’arrivée d’un nouveau piéton.

 Il n’y a pas de narration possible du film HOLY MOTORS. C’est un peu comme si en tant qu’amateurs, nous faisions de la plongée sous-marine et qu’avec nos allures de monstres, nous  demandions aux poissons et aux requins de nous donner leurs impressions. Dans le film tous les personnages assument leur qualité de « monstres ». Qu’est ce qui est monstrueux ? C’est ce qui se voit. Tout se passe un peu comme si nous parlions pendant un temps indéfini avec une personne dont nous ne verrions le visage que projeté sur un miroir. L’impression est éprouvante, l’interlocuteur n’est pas derrière le miroir, il est derrière notre dos, comme dans la vie.

 Léos Carax filme en quelque sorte ce qui se passe dans notre dos. Il avance avec sa caméra derrière le dos des spectateurs. Monsieur OSCAR enfile une quantité de personnages que nous aurions tous pu voir d’un coup d’œil sans les détailler, au  coin d’une terrasse de café, aux Champs Elysées par exemple, sauf que nous sommes assis au cinéma. Une seule goutte de sang de mémoire et cela suffit. Le personnage d’OSCAR rentre de force dans notre cinéma.

Il veut dire que  le cinéma est vivant et peu importe qu’il passe par une caméra, nos yeux sont des caméras. Les rues, les voitures, les monuments, les fantômes de nos souvenirs  nous observent. Nous sommes cernés. Ses visions  sont comme des coups de pinceau à même la peau. C’est du maquillage pour jouir de chaque visage, pour exprimer la surprise même à travers un masque, jouer le jeu de la sublime, fatale, monstrueuse apparence.

 Je me suis transportée dans ce film comme dans un poème de Lautréamont. Léos CARAX aime les comédiens et nous les fait aimer. Avec quelques frissons comme au temps d’ « Autant en emporte le vent » ou « le Docteur Jivago », même si cela n’a rien à voir,  ce film nous regarde. Il a pour échelle Denis Lavant, Edith Scob, Michel Piccoli  etc…J’ai entendu dire qu’ils étaient poètes dans la vie, incognito. Je cinémarêve !!!

 Paris, le 12 Juillet 2012                    Evelyne Trân

Distribution du film :

 

« Oh ! a dit le peintre »

« Oh ! a dit le peintre » quand il a vu l’oiseau se percher sur son arbre.

Caresse de l’arbre au pinceau. L’oiseau qui passe par hasard vole le pinceau qui était en train de peindre. 

Alors sur un nuage de peinture, voici l’oiseau, l’arbre et puis le peintre qui se dévisagent et rougissent ensemble.

 Le peintre prend une tête d’oiseau et l’oiseau se met à peindre l’arbre à souhaits. L’arbre sourit, se penche vers l’oiseau et désigne le peintre qui dit :

 « Dans mon pays, je suis l’arbre et l’oiseau à la fois »

 Il a l’impression de caresser du vide avec ses mots. Caresse de l’arbre.  L’oiseau se juche sur  la pensée du peintre, juste avant de s’envoler.

Clin d’œil de l’arbre et de l’oiseau à l’homme qui peint.

 Seigneur pinceau !

 Paris, le 7 Juillet 2012 

Evelyne Trân